Deuxième de cinq grandes formations entendues en nos murs en l'espace de six jours, l'Orchestre symphonique de Québec était présenté hier soir par l'OSM dans sa série «Air Canada». Nous assistions du même coup à de doubles adieux - adieux non pas déchirants, mais quand même dignes de mention.

C'était la dernière fois que le plus ancien orchestre canadien - l'OSQ fut fondé en 1902 - se produisait dans la salle Wilfrid-Pelletier, son retour (si retour il y a) le trouvant, en principe, dans la nouvelle salle.

C'était aussi la dernière fois que nous retrouvions Yoav Talmi comme titulaire de l'OSQ, le chef israélien de 68 ans terminant présentement sa 12e et dernière saison dans la Vieille Capitale.

Avant tout, ce concert annonçait la fin abrupte d'une association que l'on croyait pourtant en pleine vitesse de croisière. Dans les circonstances, l'extraordinaire bonne humeur de l'ouverture Carnevil - ou Carnaval - de Dvorak, avec laquelle Talmi lança énergiquement le concert, avait de quoi étonner, je dirais même rassurer. Même chose dans la Danse hongroise de Brahms ajoutée en rappel.

Brahms occupait déjà plus de la moitié du programme avec sa deuxième Symphonie. Le résultat se résume en trois mots: un bel effort.  Les cordes de l'OSQ - les violons surtout - ne possèdent ni le nombre, ni la puissance de jeu que requiert cette musique; elles jouent juste, mais cela ne suffit pas. On a aussi noté un manque de fondu chez les cuivres, surtout au début. Par contre, les bois sont impeccables, les timbales aussi. Il y a quand même, au sein de l'ensemble de 65 musiciens, et peut-être à cause du climat actuel, quelque chose d'un peu indolent qui rappelle ce qu'était le Métropolitain il y a quelques années.

Avec des moyens aussi limités, M. Talmi ne put mener son Brahms très loin. On s'étonne même de ce choix, au départ. Dans les circonstances, on ne regrettait pas qu'il ait omis les 18 pages de reprise au premier mouvement. En revanche, il était impressionnant de le voir diriger de mémoire, les habitués de l'OSM n'étant pas particulièrement gâtés de ce côté-là.

Avant l'entracte, la très jeune pianiste française Lise de la Salle, 23 ans, jouait le deuxième Concerto de Saint-Saëns. L'oeuvre, qui faisait 25 minutes hier soir, est à la fois superficielle et irrésistible, extrêmement bien écrite et atrocement difficile pour le (ou la) soliste.

Lise de la Salle n'a connu aucune espèce de problème de technique; elle a même révélé une redoutable force musculaire, en plus d'une parfaite clarté de jeu. Mais elle a pris le premier mouvement beaucoup trop lentement - en fait, elle l'a ralenti, cherchant manifestement à faire du Deuxième de Saint-Saëns l'équivalent du Deuxième de Brahms. Elle a retrouvé l'esprit un peu canaille du concerto dans le sautillant Scherzo et respecté le tempo casse-cou du Presto final. Talmi et l'OSQ ont dialogué avec elle sur la même longueur d'ondes.

________________________________________________________________________________

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE QUÉBEC. Chef d'orchestre: Yoav Talmi. Soliste: Lise de la Salle, pianiste. Hier soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Présentation: Orchestre Symphonique de Montréal, série «Air Canada».

Programme:

Carnevil, ouverture de concert, op. 92, B. 169 (1891) - Dvorak

Concerto pour piano et orchestre no 2, en sol mineur, op. 22 (1868) - Saint-Saëns

Symphonie no 2, en ré majeur, op. 73 (1877) - Brahms