«Den Kopf des Jochanaan!» Cette interjection, Salomé la lance huit fois de suite, et de huit façons différentes et toujours de plus en plus insistantes, à son beau-père Hérode Antipas qui, par huit fois lui aussi, l'a suppliée de danser, en échange de quoi il lui a promis «tout ce qu'elle veut».

Tout ce que veut la perverse petite princesse juive, c'est la tête de Jochanaan, c'est-à-dire le prophète Jean-Baptiste, qu'elle a désiré mais qui l'a rejetée.

Telle est, en quelques mots, l'essence de la terrifiante Salomé de Richard Strauss, qui prend l'affiche à l'Opéra de Montréal demain soir, 20 h, salle Wilfrid-Pelletier de la PdA, pour cinq représentations.

Après avoir terminé sa fameuse Danse des sept voiles, Salomé réclame son «salaire», mais Hérode, affolé à l'idée de tuer cet homme qu'il craint, lui offre, à la place, la moitié de ses richesses. La petite ne veut rien entendre. Herodias (en fait Hérodiade), mère de Salomé et épouse d'Hérode, qui elle aussi déteste Jochanaan, retire alors du doigt de son époux mi-conscient l'«anneau de mort», qu'elle remet à un soldat. L'ordre est ainsi donné. Quelques instants plus tard, on apporte la tête coupée et c'est la scène finale: 15 minutes de démence au cours desquelles Salomé lui parle comme si elle était vivante et embrasse sa bouche. Horrifié, Hérode ordonne à ses hommes de l'écraser sous leurs boucliers.

Rappelons que le «Musikdrama» de Strauss, créé en 1905, est basé sur la pièce française d'Oscar Wilde créée à Paris en 1896. Strauss suit fidèlement le texte de Wilde tel que traduit en allemand par Hedwig Lachmann. L'oeuvre tient en un seul acte de moins de deux heures. Donc, pas d'entracte, et sortie du spectacle avant 22h.

C'est la quatrième fois qu'on donne Salomé à Montréal. L'Opéra du Québec le monta en 1972 et l'Opéra de Montréal en 1985 et en 1999. La distribution comprend cette fois, dans les premiers rôles, l'Allemande Nicola Beller Carbone en Salomé (elle chanta Tosca ici l'an dernier), les Canadiens John Mac Master en Hérode et Judith Forst en Herodias, et le Britannique Robert Hayward en Jochanaan.

La production est une réalisation conjointe de l'OdM et des Opéras de San Francisco et de St. Louis. La mise en scène est de Sean Curran et la scénographie est, selon l'OdM, constituée d'un iris mécanisé de 10 pieds de diamètre qui représente à la fois l'oeil de Dieu et la citerne où est emprisonné le prophète. Yannick Nézet-Séguin sera au pupitre de l'Orchestre Métropolitain considérablement augmenté pour l'occasion.