Rien de ce qu'on a entendu hier soir à Montréal/Nouvelles Musiques n'était effectivement nouveau. Les quatre pièces au programme avaient toutes été présentées ici au cours des années récentes et moins récentes.

L'exécution la plus lointaine remonte à 1988: c'est celle du «gros morceau» de la soirée d'hier, De Staat, du Néerlandais Louis Andriessen, d'ailleurs présent parmi le nombreux auditoire. N'ayant aucun souvenir de cette précédente exécution, je ne me plaindrai pas de cette reprise, surtout qu'il s'agit d'une très bonne pièce.

On peut ignorer complètement le lien que le compositeur de 71 ans établit avec l'utopique République de Platon et ce qu'il appelle «la place de la musique dans la politique»; d'ailleurs, on ne comprend pas un mot du petit choeur et on ne sait même pas en quelle langue il chante. Du commencement à la fin des 37 minutes qu'elle requit, l'exécution dirigée par Walter Boudreau fut prodigieuse à tous égards. Par rapport au disque-référence de Reinbert de Leeuw (qui fait 35 minutes), on sentait une nouvelle fraîcheur dans ces dissonances très poussées des bois et des cuivres, une nouvelle vie dans cette motorique aux changements abrupts et aux masses de sons se répondant.

En plus de 27 instruments, la partition requiert quatre voix de femmes. Avec l'accord du compositeur, Boudreau en utilisa huit, pour assurer une parfaite continuité de son.

De 1998, soit 10 ans plus tard, date l'autre audition. Cette fois, c'est la SMCQ qui semble avoir «oublié». Joué en début de concert, Figuralmusik II, du Mexicain Javier Torres Maldonado, avait remporté cette année-là le prix unique de 5000 $ du Concours de composition que tenait alors la SMCQ. Le plus comique, c'est que, dans son programme, la SMCQ ne faisait aucune mention de son propre prix et parlait plutôt de celui que Maldonado remporta chez son concurrent, le NEM!

La pièce dure 10 minutes et divertit encore, avec ses violents coups de grosse caisse et son timide solo de clarinette basse.

Troisième pièce déjà entendue: Four2, de John Cage. Invité à la diriger hier soir, Peter Schubert l'avait programmée dès 2006 avec une autre formation chorale. Elle requiert 16 choristes, soit huit hommes et huit femmes, qui décident eux-mêmes de l'exécution au moyen de signes et de divers petits appareils. Tout cela est plutôt enfantin, comme souvent chez Cage. Le même résultat pourrait certainement être obtenu par des moyens normaux.

En plus enfantin encore, la pièce de Nicole Lizée pour platiniste - j'allais faire un vilain jeu de mots! - et ensemble instrumental, jouée à McGill en 2008. Le platiniste (ou opérateur de tables tournantes) vient des bars spécialisés et devrait y rester. Les sons qu'il obtient en variant la vitesse de 33-tours offrent peu d'intérêt; le mélange de ces sons avec ceux des instruments, encore moins. On ne voit pas ce que cette niaiserie vient faire dans un concert.

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SOCIÉTÉ DE MUSIQUE CONTEMPORAINE DU QUÉBEC. Ensemble de la SMCQ, dir. Walter Boudreau, et Ensemble VivaVoce, dir. Peter Schubert. Hier soir, salle Pierre-Mercure. Dans le cadre de Montréal/Nouvelles Musiques.

Programme:

Figuralmusik II, pour 10 instrumentistes (1996) - Javier Torres Maldonado

Four2, pour 16 chanteurs (1990) - John Cage

This Will Not Be Televised, pour platiniste et sept instrumentistes (2005-07) - Nicole Lizée

De Staat, pour quatre voix de femmes et 27 instrumentistes (1973-76) - Louis Andriessen