Ce concert marque les débuts à l'Orchestre Symphonique de Montréal du chef français Marc Piollet, 48 ans, et du pianiste américain Jonathan Biss, 30 ans.

Marc Piollet est inconnu ici. C'est aussi le cas de Jonathan Biss, si l'on excepte, à Lanaudière en 2009, un récital qui passa inaperçu.

L'entrée du chef invité a quelque chose de surprenant. Voici, très certainement, le chef le plus grand - je parle du physique - que l'OSM ait reçu dans toute son histoire. Quelques gestes très lents des deux bras abaissés vers l'orchestre en tirent un son profond dont se détachent les cors puis les trémolos des violons. Le décor du Freischütz de Weber est planté et l'auditeur est situé: la silhouette trop dansante reste celle d'un chef sérieux.

Le concerto vient ensuite et, pour la énième fois, ce sera Beethoven et ce sera le troisième, en do mineur. Jonathan Biss est le petit-fils de la violoncelliste Raya Garbousova et le fils de la violoniste Miriam Fried. Ces références ne font pas nécessairement de lui un grand pianiste, mais elles ne nuisent pas.

Ce que M. Biss propose comme interprétation est traditionnel, pianistiquement correct et musicalement valable. Il choisit les cadences de Beethoven. Dans celle qui termine le premier mouvement, il souligne à l'infini le trille qui précède la rentrée de l'orchestre - une idée intéressante. Une idée meilleure encore, histoire de varier un peu l'exercice, serait de puiser occasionnellement aux cadences que Liszt, Brahms, Clara Schumann, Fauré et Edwin Fischer, entre autres, ont écrites pour ce concerto.

On a entendu quelques fausses notes et noté quelques divergences de tempo entre piano et orchestre. Rien de grave: tout s'est vite arrangé.

L'après-entracte appartient au chef invité, qui propose sa conception du Concerto pour orchestre de Bartók. Intéressant: c'est aussi un chef français, et nul autre que le légendaire Pierre Monteux, qui dirigea la première ici, en 1955, de cette oeuvre d'ailleurs conçue dans l'État de New York.

Prenant les 40 minutes habituelles que requiert la partition en cinq mouvements, M. Piollet en souligne tour à tour le mystère, la gravité, la tendresse et l'humour caustique tout en laissant les nombreux solistes de l'orchestre - car il s'agit de leur concerto - briller à tour de rôle comme virtuoses et comme musiciens: Lavallée à la caisse claire (2e mouvement), Spicer au piccolo (fin du 3e mouvement), Plante au cor-anglais, Hutchins à la flûte et Crowley à la clarinette (4e mouvement), Merkelo à la trompette (5e mouvement).

On peut réentendre le Weber et le Bartók ce matin, 10 h 30, aux «Matins symphoniques». Le soliste est différent: Andrew Wan dans le Concerto pour violon de Mendelssohn.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: Marc Piollet. Soliste: Jonathan Biss, pianiste. Hier soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Série «Air Canada».

Programme:

Ouverture de l'opéra Der Freischütz, J. 277 (1821) - Weber

Concerto pour piano et orchestre no 3, en do mineur, op. 37 (1803) - Beethoven

Concerto pour orchestre, Sz. 116 (1943) - Bartók