Juste après Québec, c'est au tour de Montréal de recevoir la soprano la plus connue et sans doute l'une des plus adulées du monde lyrique actuel. Si l'on a pris l'habitude de la voir au cinéma dans les productions à grand déploiement diffusées en direct du Met depuis quelques années, cette fois, c'est en récital qu'elle se présente à nous demain.

Un récital consacré à des oeuvres écrites pour la plupart au tournant du siècle. «Ma période favorite, et celle qui convient le mieux à ma voix», a-t-elle expliqué à La Presse lors d'un bref entretien téléphonique.

Il s'agit essentiellement du même programme que celui présenté à Québec le 5 janvier, où elle a rempli à craquer la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre pour lancer la saison du 120e anniversaire du Club musical, et suscité une critique dithyrambique de notre collègue Richard Boisvert, du Soleil.

La diva sera accompagnée d'un complice de longue date, le pianiste Hartmut Höll, qui a été son professeur lorsqu'elle a étudié en Allemagne, et qui a joué avec le baryton Dietrich Fischer-Dieskau pendant une décennie. «Il est très brillant et apporte beaucoup d'imagination musicale à la table, dit la chanteuse. C'est un partenaire à part entière.»

On entendra donc des lieder de Richard Strauss et d'Erich Korngold (mieux connu pour sa musique de film), ainsi que des mélodies d'Henri Duparc et des arias de Puccini, Leoncavallo et Zandonai. On retrouve d'ailleurs certaines de ces pièces sur son album Verismo, sorti il y a deux ans.

Un seul compositeur actuel figure au programme: le pianiste de jazz américain Brad Mehldau. Il a écrit pour elle il y a cinq ans The Book of Hours, à partir des poèmes de Rainer Maria Rilke traduits en anglais, dont nous entendrons des extraits. Il ne s'agit toutefois pas d'airs de jazz, souligne la soprano.

«Il y a certainement des éléments de jazz et de populaire dans ses pièces, car cela demeure la voix de Mehldau, mais c'est une oeuvre classique, dit-elle. J'ai inclus ces pièces dans le programme parce qu'elles nous transportent un peu dans le même monde que Strauss ou Korngold. Toutefois, ce sont les pièces de Mehldau qui représentent le plus grand défi pour moi dans ce récital, à cause de la complexité du langage.»

Rockeuse à temps partiel

Comblée par sa carrière et son répertoire, la vedette du Met est sortie de sa zone de confort en lançant à la surprise générale Dark Hope, album rock, l'été dernier. Dans un registre plus grave où elle a mis complètement de côté sa voix d'opéra, elle y reprend, entre autres, des chansons d'Arcade Fire, de Muse et le fameux Hallelujah de Leonard Cohen.

«Je voulais faire quelque chose de différent, et je voulais le faire sans me servir de ma voix d'opéra, dit-elle. C'était une occasion fascinante et j'ai beaucoup appris sur ce style de musique.»

Que ceux qui ne peuvent assister au récital de demain se consolent: ils pourront bientôt voir et entendre Renée Fleming au cinéma dans Capriccio, de Richard Strauss, qui sera diffusé en direct du Met le 23 avril prochain, en rediffusion le 21 mai.

Pour la chanteuse, il ne fait pas de doute que la diffusion des productions sur grand écran partout dans le monde est une bénédiction pour l'art lyrique. «C'est la plus grande invention en opéra depuis celle des surtitres», dit celle qui anime à l'occasion les entractes de ces présentations cinématographiques. «Il y a maintenant un nouveau public, j'en ai la preuve régulièrement lorsqu'en tournée, des gens viennent me voir et me disent: je vous ai vue au cinéma.»

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Renée Fleming, demain, 20 h, salle Wilfrid-Pelletier.