C'est un programme axé sur le brio orchestral, et parfaitement rendu comme tel, qu'Alexis Hauser présentait vendredi soir avec les 100 jeunes de l'Orchestre symphonique de McGill dont il est le titulaire.

Finlandia de Sibelius lance la soirée en trombe. Avec cette poigne extrêmement énergique et stimulante qui étonne toujours chez lui, Hauser évoque, dans cette courte pièce devenue deuxième hymne national de la Finlande, la lutte menée par le peuple finnois contre l'occupant russe. Ces huit minutes d'entrée trouvent déjà le jeune orchestre, et particulièrement les cuivres, dans une forme spectaculaire.

L'après-entracte est consacré aux Tableaux d'une exposition, la fameuse suite pour piano de Moussorgsky connue grâce surtout à l'orchestration de Ravel.

On souhaiterait voir un chef choisir, à l'occasion, parmi les nombreuses autres orchestrations qui existent de cette suite. Dutoit choisit un jour la toute première, celle de Touchmalov, et Nézet-Séguin proposa celle de Walter Goehr.

Comme la plupart, Hauser nous ramène la version Ravel, sans doute parce que c'est celle que ces futurs musiciens d'orchestre seront appelés à jouer le plus souvent. Dans l'absolu, je dois lui donner raison car il confirme ici, par son imagination et son soin du détail, que la version Ravel est très certainement la plus géniale de toutes.

Le jeune orchestre et ses premiers-pupitres affichent du commencement à la fin de la périlleuse partition une tenue impressionnante. Les solos (trompette, saxophone, tuba) acquerront éventuellement leur vrai caractère -il s'agit d'un orchestre d'étudiants, ne l'oublions pas- mais, déjà, le résultat ne pose à peu près pas de problèmes au plan des notes.

La masse des cordes dans le dialogue des deux Juifs polonais, l'un riche, l'autre pauvre, possède plénitude et justesse, les bois dansent bien, les cuivres sont riches et profonds, et les percussions couronnent le tout dans un tintamarre qui secoue les murs de Pollack. À la fin du solo de saxophone, il manque le curieux petit glissando qui mène à l'avant-dernière mesure. Rien de grave puisque ce détail est presque toujours ignoré!

Le soliste du concert est Ewald Cheung, violoniste de 20 ans d'Edmonton, élève de Jonathan Crow à McGill et déjà gagnant de plusieurs prix. Il a fait un choix très audacieux pour son âge: le Concerto de Sibelius, l'un des sommets du répertoire quant à la difficulté technique et la dimension expressive. Il a commis vendredi soir quelques légères fautes de justesse que sa solidité devrait éliminer.

Voici, en effet, un vrai violoniste, avec de la sonorité et de la musicalité, qui écoute bien l'orchestre autour de lui (que Hauser dirige de mémoire, comme le reste du programme) et qui révèle déjà d'intéressantes idées comme interprète. Ainsi, son mouvement lent, intense et même tourmenté.

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE McGILL / McGILL SYMPHONY ORCHESTRA. Chef d'orchestre : Alexis Hauser. Soliste : Ewald Cheung, violoniste. Vendredi soir, Pollack Hall de l'Université McGill.

Programme:

Finlandia, poème symphonique, op. 26 (1899) - Sibelius

Concerto pour violon et orchestre en ré mineur, op. 47 (1903-05) - Sibelius

Tableaux d'une exposition, pour piano (1874) - Moussorgsky, orchestration: Ravel (1922)