Après beaucoup de baroque italien, Marie-Nicole Lemieux se tourne vers l'opéra romantique français. Son dernier disque, chez Naïve, réunit 10 airs dont la moitié sont bien connus.

Sa voix de grand mezzo dramatique, capable d'incursions dans les registres opposés de soprano et de contralto, et son français généralement clair (et sans cet accent étranger des chanteuses non francophones!): autant de qualités qui traduisent avec vérité l'irrésistible numéro de séduction de Samson et Dalila de Saint-Saëns (ce «Mon coeur s'ouvre à ta voix» connu de tous), le troublant monologue de Werther de Massenet où Charlotte relit les lettres du poète, les déchirants adieux à la vie de la reine Didon, à la fin des Troyens de Berlioz, et, en tout début de programme, cette page d'Hérodiade de Massenet où l'épouse d'Hérode réclame la tête du prophète Jean-Baptiste, qui l'a insultée.

Ce «Ne me refuse pas» que répète Hérodiade est devenu le titre assez équivoque du disque, qu'illustre une photo de notre Marie-Nicole échevelée et à moitié dévêtue. Il est vrai que la marque Naïve (qui ne l'est pas vraiment!) nous a habitués à pire. Passons.

Au même genre dramatique appartiennent deux raretés offertes ici, tirées de Charles VI, opéra complètement inconnu de Jacques Fromental Halévy, l'auteur de La Juive, et de la très obscure Clytemnestre d'un certain André Wormser, mort en 1926.

En total contraste, Marie-Nicole Lemieux sait amenuiser ses puissants moyens vocaux pour retrouver la simplicité du «Connais-tu le pays?» de Mignon, d'Ambroise Thomas, et de la Habanera de Carmen, de Bizet. L'air de Néris, la suivante dans la Médée de Cherubini, est chanté dans l'original français. Autre précision: Roméo et Juliette de Berlioz n'est pas un opéra mais une «symphonie dramatique».

Peu impressionnant lors de ses passages ici à l'Orchestre Métropolitain, le jeune chef Fabien Gabel obtient de l'Orchestre National de France un commentaire toujours agissant. Excellent, aussi, le Jeune Choeur de Paris dans deux pages.

Le programme se termine par une «surprise»: c'est, une minute après la dernière plage, un air d'Offenbach qui n'ajoute rien à ce qui précède.

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MARIE-NICOLE LEMIEUX, MEZZO-SOPRANO. AIRS D'OPÉRAS FRANÇAIS. NAÏVE, V 5201