Comme si le public trouvait que trois Mahler en un mois, c'est beaucoup - et ce l'est, en effet! -, la salle Wilfrid-Pelletier, hier soir, était moins remplie que la semaine dernière. Trois Mahler en un mois... et quatre Mahler en deux mois, si l'on compte celui de l'«autre orchestre». Davantage même puisque la première Symphonie, entendue hier soir, est reprise par Nagano et l'OSM samedi soir, dimanche après-midi et jeudi prochain en matinée.

Nagano avait dirigé cette même Première de Mahler à l'OSM en septembre 2007. Avec de la suite dans les idées, il dispose l'orchestre de la même façon qu'il y a trois ans: violons de part et d'autre du podium, contrebasses à l'extrême gauche et violoncelles devant vers le centre, harpe isolée à l'extrême droite, les 17 cuivres faisant écran au fond de la scène.

Cette disposition sert encore l'évidente volonté, chez l'analytique Nagano, de clarifier la lourde partition. En même temps, on sent chez lui une constante application dans le sens de l'expression. Tout le début de la symphonie baigne dans un véritable suspense, l'orchestre colore d'une étrange ironie les deux mouvements médians puis lance le finale avec une force qui fait sursauter une partie de l'auditoire. Bref, Nagano nous en dit plus, cette fois, qu'il y a trois ans.

Il fait aussi la reprise au premier mouvement et, comme le prescrit la partition (qu'il a devant lui), fait lever les sept cornistes pour la péroraison. J'avais noté, il y a trois ans, quelques petites imprécisions dans l'orchestre. Même chose hier soir. Elles devraient disparaître au cours des trois autres lectures.

Le concert débute par un petit discours du maestro qui, dans son français bien connu, nous invite à «un nouveau expérience». Messagesquisse, de Boulez, est une première à l'OSM... mais peut-être pas à Montréal, ajoute-t-il prudemment. En effet, la pièce fut jouée à la SMCQ en 1990, sous la direction de Walter Boudreau, avec Alain Aubut au violoncelle-solo.

Nagano compare la pièce à un pâté chinois. Ceci n'est pas une blague. Je pense même que son analyse bilingue du pâté chinois a pris plus de temps que la pièce elle-même, qui a duré neuf minutes - neuf minutes qui se ramènent à une sorte de mouvement perpétuel dont émergent tour à tour le violoncelle-solo de l'orchestre et six de ses collègues.

On retourne ensuite en territoire doublement familier: l'irrésistible premier Concerto de Bruch et la violoniste allemande Viviane Hagner, 33 ans, que Nagano nous ramène pour la énième fois sans que son talent ne justifie une telle assiduité.

Le niveau de jeu est celui d'une très bonne élève de conservatoire. Articulation, justesse, sonorité: tout est simplement correct. Au finale, une erreur dans l'orchestre fait rater une double corde au violon. Rien d'autre à signaler.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef d'orchestre: Kent Nagano. Soliste: Viviane Hagner, violoniste. Hier soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Série «Air Canada». Reprise dimanche, 14 h 30, série «Dimanches en musique».

Programme:

Messagesquisse, pour violoncelle-solo et six violoncelles (1976-77) - Boulez

Concerto pour violon et orchestre no 1, en sol mineur, op. 26 (1866) - Bruch

Symphonie no 1, en ré majeur (1884-88) - Mahler