À ses débuts, en novembre 2008, l'Orchestre 21 de Paolo Bellomia se ramenait à une formation de 38 bois, cuivres et percussions. Pour le concert d'hier soir, le chef coupait de moitié (environ) cet orchestre d'harmonie et ajoutait aux 20 instruments un nombre égal de cordes.

On se retrouvait donc devant une sorte de «modèle réduit» d'orchestre symphonique. Cet orchestre, on l'a assez peu entendu cependant. Le chef l'avait cantonné derrière des solistes qui se sont succédé sans arrêt pendant plus de deux heures, exception faite des 20 minutes d'entracte et des six minutes que faisait l'Élégie d'Alan Belkin, seule pièce sans soliste du programme entier.Le clarinettiste Jean-Guy Boisvert, qui enseigne à l'Université de Moncton (mais non à Montréal, comme le donnait le feuillet), monopolisait presque toute la première moitié du programme.

Ouvrant le concert, le très obscur Concertino du petit maître Michael Haydn (jeune frère du célèbre Joseph) est constitué de deux mouvements provenant, semble-t-il, d'une sérénade qui en contient plusieurs. Il y a là deux cadences et une intéressante exploitation du chalumeau (le registre grave de la clarinette). De tout cela, le soliste tira le maximum. Oublions un couac vers la fin.

Il revint avec deux clarinettes pour la Sinfonietta no 2 de Penderecki, qui est en fait la transcription que le compositeur polonais fit de son Quatuor pour clarinette et cordes de 1993. Penderecki y fait alterner les deux clarinettes en la et en si bémol. Soliste, chef et cordistes (y compris le violon-solo au suraigu) tombèrent d'accord sur l'atmosphère à créer. Seul problème: l'oeuvre en quatre mouvements semble apprêtée et finit par ennuyer.

M. Boisvert termina avec une lecture impeccable de la modeste Rhapsodie de Debussy, après s'être absenté six minutes, le temps de l'Élégie susmentionnée de M. Belkin. Les altos ouvrent la pièce et lui donnent la couleur sombre qui convient. Plus tard, des passages se révèlent d'une justesse approximative dont on se demande si elle est accidentelle ou voulue.

M. Bellomia termine la première partie avec sa contribution (sa deuxième, je crois) à cet «hommage» à Gilles Tremblay qui semble ne jamais devoir finir. Hier soir, c'était Traversée, pour flûte... traversière et orchestre. La très jeune Amélie Brodeur est une extraordinaire technicienne de son instrument pour qui les multiphoniques sont jeu d'enfant. La plus belle énergie animait ses dialogues avec le violon et avec les percussions. Mais la pièce est répétitive et beaucoup trop longue : 20 minutes. Tremblay avait tout dit dans les cinq premières.

L'après-entracte était occupé par les 25 minutes que fait le Concerto pour deux pianos et deux percussions de Bartok. C'est la version orchestrale de la fameuse Sonate que Bartok et sa femme Ditta Pasztory créèrent et enregistrèrent. L'orchestre est éclipsé par l'assourdissant et magnifique tapage que font les quatre solistes à l'avant-scène. Au centre de l'action, imperturbable et précis, Bellomia réalisa là, avec son quatuor, un tour de force.

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ORCHESTRE 21. Chef d'orchestre : Paolo Bellomia. Solistes: Jean-Guy Boisvert, clarinettiste, Amélie Brodeur, flûtiste, Jean-Fabien Schneider et Irina Krasnyanskaya, pianistes, Julien Compagne et Corinne René, percussionnistes. Hier soir, Pollack Hall de l'Université McGill.

Programme:

Concertino en la majeur pour clarinette et orchestre (1764) - M. Haydn

Sinfonietta no 2, pour clarinette et cordes (1993-94) - Penderecki

Élégie pour cordes (1994) - Belkin

Rhapsodie pour clarinette et orchestre (1909-11) - Debussy

Traversée, pour flûte et orchestre (1996) - Tremblay

Concerto pour deux pianos, deux percussions et orchestre, Sz. 115 (1937-40) - Bartok