On connaît le Requiem de Verdi au disque depuis 1927, année du tout premier enregistrement, avec l'illustre basse Ezio Pinza et des solistes aujourd'hui oubliés, sous la direction de Carlo Sabajno, et on le connaît ici, au concert, depuis l'audition de 1937 montée par Wilfrid Pelletier avec ce qui allait devenir l'OSM.

Jusqu'à ces récentes années, le Requiem le plus célèbre du répertoire était donné assez régulièrement ici à l'occasion de la Semaine sainte. Il ne l'est plus. Souhaitons que cette mise en veilleuse soit de courte durée. Par contre, l'oeuvre n'est pas oubliée par les maisons de disques. Une nouvelle version vient justement de paraître, chez EMI, dirigée par Antonio Pappano, avec la soprano allemande Anja Harteros, la mezzo italienne Sonia Ganassi, le ténor mexicain Rolando Villazon et la basse allemande René Pape comme solistes, le Choeur et l'Orchestre de l'Accademia Nazionale di Santa Cecilia de Rome.

 

La conception la plus courante du Requiem de Verdi rapproche l'oeuvre du théâtre, voire de l'opéra. Un musicologue l'a même qualifié, non sans raison, de «dernier opéra de Verdi». Et c'est dans cet esprit qu'Antonio Pappano l'aborde, rejoignant ainsi ses prédécesseurs Toscanini, Serafin, De Sabata et Giulini.

Les quatre solistes sont excellents. J'aime la façon très italienne, très opératique, avec laquelle Pappano les laisse respirer au tournant d'une phrase ou s'attarder sur certains mots. Le procédé met en valeur texte et musique, dans une prise de son qui isole chacune des voix chantant ensemble.

René Pape se détache du quatuor par une voix et une présence hors du commun. Néanmoins, ce quatuor est sans faiblesses : les deux voix féminines forment un beau contraste et Villazon n'abuse pas de son habituel style larmoyant.

Pappano anime choeur et orchestre avec une gamme dynamique pour ainsi dire infinie, allant, comme l'indique Verdi, du «più piano possibile» à peine audible au plus tonitruant «tutta forza». Le choeur, très puissant, est aussi capable du plus doux murmure. Mêmes riches nuances dans l'orchestre, dont se détachent le sombre basson, les éclatantes trompettes se répondant ou les menaçants coups de grosse caisse.

VERDI : MESSA DA REQUIEM

DIR. ANTONIO PAPPANO

EMI, ALBUM 2D., 6989362

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