Pour Edgar Fruitier, toute musique est une oeuvre sacrée. Et la musique sacrée l'est plus encore que les autres... sauf peut-être l'opéra.

Non, l'entrevue qu'il accorde à l'occasion de la sortie de son nouveau coffret n'empêchera pas Edgar Fruitier de parler de la passion qu'il éprouve pour une oeuvre comme Don Giovanni. L'opéra de Mozart ne figure pas parmi les 77 morceaux qu'on retrouve sur l'ensemble de six CD, mais qu'à cela ne tienne. Le comédien est parti. Il vous racontera comment le chef Otto Klemperer a réussi à retrouver l'usage de ses jambes en dirigeant la scène finale à Budapest. «À l'entrée du Commandeur, dans la clameur des trombones, Klemperer s'est dressé debout et il n'a plus jamais dirigé assis! J'ai toujours considéré ce moment comme de la musique sacrée. C'est l'au-delà qui se manifeste! Ai-je besoin de vous dire que c'est une oeuvre qui me fascine?»

D'accord, M. Fruitier, mais ne sommes-nous pas ici pour parler de musique sacrée?

«Mais pour moi, c'est une oeuvre de musique sacrée!»

Si vous voulez, mais elle ne fait pas partie du coffret.

«Non, malheureusement, comme bien d'autres choses..»

Vous dites à qui veut l'entendre que vous n'êtes pas très religieux. En revanche, on peut dire que vous vouez un véritable culte à la musique...

«Oui, je pense que c'est là que je retrouve non pas la foi, mais une sorte de chose sublimée qui nous transporte dans un monde impossible à rejoindre, sinon au moment de la mort, peut-être. Pour moi, c'est l'art par excellence. La musique nous entraîne dans une quête dont le but reste un mystère. Et cela est très proche de la religion.»

Donc vous êtes à la recherche de quelque chose?

«Mais depuis toujours! Quand je vous dis que j'ai 54 versions de Don Giovanni et que je vais en acheter d'autres sans doute!»

Ici, notre interlocuteur se met à raconter les débuts de Dimitri Mitropoulos à Salzbourg, en 1956, avec force détails. À croire qu'il s'y trouvait lui-même.

«Excusez-moi, je m'emporte un peu», fait-il, au bout de quelques minutes.

Pas de problème, M. Fruitier. C'est pour ça que les gens vous aiment et vous font confiance. À ce propos d'ailleurs, on a parfois l'impression que grâce à vous, ils redécouvrent le plaisir d'écouter de la musique.

«Vous faites aimer la musique», renchérit Mgr Ouellet qui, en sa qualité de parrain d'honneur du coffret, participe également à l'entrevue. Il faut dire que jusque-là, le cardinal n'avait guère réussi à placer plus de deux ou trois mots. «C'est une grande mission, ajoute le cardinal, sourire en coin. La musique sacrée, ça élève, ça humanise, ça fait entrer une autre dimension.»

«Bien sûr, c'est ça qu'on veut. Mais pour ce qui est d'être missionnaire, je pense que non sum dignus ut intres sub tectum meum», lance le mélomane dans un grand éclat de rire, comme pour bien faire comprendre à Mgr Ouellet qu'il n'est pas au bout de ses peines si ce dernier espère le convertir un jour.

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