Ce n'est pas l'enthousiasme débordant, mais il reste que le meilleur de ce concert de l'OSM présenté dans le cadre du Festival Bach s'est ramené à l'heure qu'occupait en fin de soirée la quatrième Symphonie de Mahler.

Ne nous demandons plus ce que Mahler faisait là: il sauva le concert! C'est avec Mahler que Kent Nagano se fit d'abord connaître ici et il semble que ce soit là l'une des rares musiques où il parvient à émouvoir. Sa direction du mouvement lent, Ruhevoll (littéralement : plein de calme), était à la fois intense, dramatique et raffinée, avec une conclusion toujours de plus en plus douce et retenue, comme l'indique Mahler dans sa partition. Mention ici au parfait hautbois de Theodore Baskin.

Nagano rendit également convaincant tout ce qui entourait ce mouvement charnière. Malgré deux ou trois petits ratés chez les cors et une note de clarinette qui n'était pas la bonne (!), l'OSM était en forme mardi soir et Nagano en tira une interprétation remarquable par sa transparence et l'éclat des bois.

Les deux instruments utilisés par le violon-solo au deuxième mouvement ont piqué la curiosité de certains auditeurs. Non, Andrew Wan ne cherchait pas à «ménager» son nouveau violon. Pour obtenir un effet de crincrin, Mahler ajoute simplement un violon accordé trop haut au violon accordé normalement.

Au quatrième et dernier mouvement, une soprano décrit le paradis tel qu'imaginé par un enfant. Hélène Guilmette (qui avait pris place devant l'orchestre dès le troisième mouvement) apporta au texte naïf les vertus requises: simplicité, voix jeune et claire. Quelques notes se perdaient sous l'orchestre cependant.

Bach et l'un de ses fils venaient avant l'entracte. Du père, c'était le Concerto italien pour clavecin arrangé par un certain Joachim F.W. Schneider pour une trentaine de musiciens: violons en pizzicati, deux contrebasses, bois, timbales. Une fantaisie habile en soi mais gratuite et n'apportant strictement rien à l'original.

Le banal Concerto en fa majeur pour deux clavecins de Carl Philipp Emanuel suivait, joué par Ton Koopman et sa femme Tini Mathot. Madame était au premier clavecin, correcte mais effacée, et monsieur cabotinait au clavecin placé derrière. À la corbeille, on n'entendait les deux instruments que dans les passages où l'orchestre se taisait.

_________________________________________________________________________________________________

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef d'orchestre: Kent Nagano. Solistes: Ton Koopman et Tini Mathot, clavecinistes, et Hélène Guilmette, soprano. Mardi soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Série «Grands Concerts» et Festival Bach.

Programme:

Concerto italien en fa majeur, pour clavecin, BWV 971 (c. 1735) - J.S. Bach (arr.: Joachim F.W. Schneider)

Concerto pour deux clavecins et orchestre en fa majeur, Wq 46 (1740) - C.P.E. Bach

Symphonie no 4, en sol majeur, avec solo pour soprano (1899-1901) - Mahler