Le Concerto pour orchestre de Bartok est un défi pour toute phalange professionnelle, à plus forte raison pour une formation d'étudiants. Dirigeant de mémoire la complexe partition (exploit interdit à bien des chefs chevronnés), Alexis Hauser a obtenu de la centaine de jeunes de l'Orchestre symphonique de McGill massés sur la scène de Pollack Hall vendredi soir une exécution étonnamment en place, toujours vivante, colorée et riche en plans sonores.

Comme son titre l'indique, l'oeuvre met en lumière la virtuosité collective d'un orchestre et la beauté de ses timbres, principalement chez les vents. Nous avons eu tout cela, et ce, pendant 40 minutes. Des imperfections? Très rares et très minimes. En plus d'être précis, M. Hauser a redonné son caractère à chaque mouvement, soulignant, par exemple, l'humour du Jeu de couples et de l'Intermezzo interrompu.

 

La soliste, la jeune violoniste française Sonia Coppey, avait choisi un concerto de Mozart peu fréquenté, le K. 211, en ré majeur. Elle possède une bonne technique, une belle sonorité et elle joue juste. On souhaiterait simplement une articulation plus incisive. Les trois cadences étaient de sa main.

En début de concert: un Smetana enlevé à toute allure, survolté même.

Samedi soir, six pianistes associés au Centre d'arts Orford se produisaient au profit de la Fondation du Conservatoire: Olivier Godin, organisateur de la fête et auteur de la plupart des transcriptions entendues, Sandra Murray, Claire Ouellet, Mariane Patenaude, Francis Perron et Lorraine Prieur. D'égale force - et quelle force! -, ils alternaient aux six pianos dans Rossini, Smetana, Saint-Saëns, Prokofiev et Gershwin ou bien se présentaient quatre à la fois en doubles duos dans Gounod et Bizet.

Les pièces familières prenaient ainsi une nouvelle et spectaculaire perspective où la subtilité avait aussi sa place. On aura surtout noté l'incroyable synchronisation des 60 doigts et la fluidité avec laquelle les airs connus circulaient d'un piano à un autre.

De retour pour la neuvième fois hier au LMMC, le trio formé de Jean-Claude Pennetier au piano, Régis Pasquier au violon et Roland Pidoux au violoncelle avait rompu sa routine habituelle en risquant une nouveauté: le Trio de 1983-84 de Michel Merlet, compositeur totalement inconnu et ancien élève de Messiaen. L'oeuvre en quatre mouvements totalise 23 minutes. Deux mouvements faisant 10 minutes suffiraient. Ce qu'il y a là de meilleur vient de Bach: c'est le mouvement intitulé Passacaille, qui développe considérablement le thème de la célèbre pièce pour orgue BWV 582.

En début et en fin de concert: le K. 542 de Mozart et l'op. 1 no 3 de Beethoven qui, ni l'un ni l'autre, ne sont de grandes oeuvres. Le piano y a le premier rôle et M. Pennetier y fut transcendant. M. Pidoux se distingua aussi mais M. Pasquier grinça à maintes reprises.

Comme se rendant compte que le groupe avait donné un concert insuffisant, M. Pidoux annonça en rappel le premier des deux Trios élégiaques de Rachmaninov: 14 minutes très intenses, en fait les meilleures du concert tout entier.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE McGILL. Chef d'orchestre: Alexis Hauser. Vendredi soir, Pollack Hall de McGill. ENSEMBLE ORFORD SIX PIANOS. Samedi soir, Salle du Conservatoire. TRIO PENNETIER-PASQUIER-PIDOUX. Hier après-midi, Pollack Hall. Présentation: Ladies' Morning Musical Club.