«L'Opéra de Montréal propose une farce et un mélo le même soir.» Notre titre du samedi 9 février 1991, nous pouvons le reprendre tel quel puisque c'est avec la même farce, Gianni Schicchi, de Puccini, et le même mélo, Pagliacci, de Leoncavallo, que l'OdM ouvre sa 30e saison ce soir.

Mêmes oeuvres de courte durée, donc, mais spectacle entièrement nouveau, faut-il le préciser. Tout d'abord, l'ordre de présentation est inverse: on jouera d'abord Pagliacci, qui fait 71 minutes, puis, après 20 minutes d'entracte, Gianni Schicchi, qui en fait 53. Ensuite, et surtout, la distribution est entièrement nouvelle - et entièrement canadienne et même québécoise -, de même que les décors, les costumes et la mise en scène.

 

L'OdM a voulu son ouverture-anniversaire dans le goût italien, c'est-à-dire en accord avec la nette préférence de son public pour le répertoire issu du bel canto. L'action se déroule d'ailleurs en Italie: Pagliacci en Calabre et Schicchi plus au nord, à Florence.

Pagliacci met en scène une troupe d'acteurs ambulants («pagliacci» signifie «bouffons») ayant à leur tête le violent Canio. Sa femme Nedda, qui fait partie de la troupe, le trompe avec le villageois Silvio. En plein spectacle, Canio cherche à arracher à Nedda le nom de son amant. Devant son silence, il la poignarde et poignarde aussi l'amant accouru à sa défense. Et le petit auditoire d'applaudir, croyant assister à du grand théâtre...

Gianni Schicchi est, après Il Tabarro et Suor Angelica, le dernier des trois opéras en un acte formant le Trittico que Puccini fit créer mondialement au «Met» de New York en 1918.

Ici encore, bref rappel de l'intrigue. Le vieux et riche Buoso Donati vient de mourir et les membres de sa famille découvrent avec stupeur qu'il a laissé tous ses biens à un monastère. Ils cachent le mort et demandent au rusé Gianni Schicchi de prendre sa place dans le lit et de dicter un nouveau testament, chacun lui soufflant à l'oreille, bien sûr, sa petite demande personnelle. Imitant la voix tremblante de Donati, le loustic annonce qu'il lègue la plupart de ses biens «à mon cher ami Gianni Schicchi». La famille se révolte, mais Schicchi l'expulse de «sa» maison, qu'il cède à sa fille Lauretta et à l'amoureux de celle-ci, Rinuccio.

Dans une mise en scène d'Alain Gauthier, avec l'OSM dirigé par James Meena, on retrouvera Marc Hervieux, Marie-Josée Lord et Étienne Dupuis dans Pagliacci, Gregory Dahl, Marianne Fiset, Antoine Bélanger et Marie-Nicole Lemieux dans Schicchi.

Rappelons que le Trittico complet fut donné ici une seule fois: en 1971, par l'Opéra du Québec, l'«ancêtre» de l'OdM. Le nouvel organisme monta Pagliacci non seulement avec Schicchi en 1991 mais avec Suor Angelica en 1996, et revint en 2002 au traditionnel jumelage Cav-Pag, c'est-à-dire Pagliacci avec Cavalleria rusticana de Mascagni.

Assez curieusement, son programme double de septembre 2006, Il Tabarro - Suor Angelica, réduisait le Trittico en Dittico, cependant que, pur hasard, McGill complétait la trilogie en janvier suivant avec Gianni Schicchi formant programme double avec L'Enfant et les Sortilèges de Ravel.