Le programme viennois qui ouvrait la série «Air Canada» de l'Orchestre Symphonique de Montréal mardi soir dépassait le cadre de valse et d'opérette où s'inscrivent habituellement ces concerts. On y trouvait de la valse et de l'opérette, oui, mais davantage aussi.

Sans aller jusqu'à puiser à la Nouvelle École de Vienne de Schoenberg et ses disciples, le chef invité Jean-Marie Zeitouni lorgna de ce côté-là avec ce Blumine que Mahler conçut à l'origine comme deuxième mouvement de sa première Symphonie et qu'il élimina par la suite. La pièce fut impeccablement jouée par le trompette-associé.

 

Zeitouni programma aussi du Mozart en début de concert: l'orchestre joua d'abord l'ouverture de La Flûte enchantée puis se vida de moitié pour accompagner Karina Gauvin dans deux airs. Un groupe de trois Danses hongroises de Brahms faisait aussi figure de nouveauté dans ce programme viennois.

Quant au traditionnel menu centré sur Johann Strauss fils et sur Richard Strauss, on le retrouvait avec ces succès que sont, du premier, l'ouverture de Fledermaus, la valse Empereur et la Tritsch-Tratsch Polka et, du second, les valses de Rosenkavalier.

Jean-Marie Zeitouni et Karina Gauvin furent, ex aequo, les deux héros de la soirée, qui faisait deux heures, entracte compris. Zeitouni avait la plus lourde tâche, étant constamment présent à la direction des pages orchestrales ou à l'accompagnement de Mme Gauvin, mais celle-ci n'avait pas la partie facile car elle devait défendre huit pièces fort différentes.

Chef très énergique et attentif à tout ce qui se passe dans l'orchestre, Zeitouni apporta aux pages les plus familières du programme un relief nouveau, y compris ce léger ritardando qui fait toute la différence. Ma seule réserve: pour Rosenkavalier, il avait choisi la moins intéressante des suites préparées par le compositeur.

Élégante, avec le sourire de celle qui aime chanter, Karina Gauvin offrit d'abord deux airs de Mozart épuisants, placés au sommet de la tessiture, qu'elle traversa cependant sans problèmes. Trois extraits du Wunderhorn de Mahler furent ensuite traduits en autant de couleurs vocales différentes. Enfin, malgré une certaine fatigue évidente, elle laissa le charme viennois opérer avec deux airs de Franz Lehar et un air de Fledermaus.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: Jean-Marie Zeitouni. Soliste: Karina Gauvin, soprano. Mardi soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Série «Air Canada».