D'abord paru en Europe chez Sony, le Mahler de Kent Nagano et l'Orchestre Symphonique de Montréal, Das Lied von der Erde ( Le Chant de la terre), vient de sortir ici sous la marque-maison de l'orchestre. À l'instar des grands orchestres du monde, l'OSM a maintenant son propre label.

L'enregistrement fut réalisé lors de deux concerts, les 13 et 14 janvier derniers, salle Wilfrid-Pelletier de la PdA. Réalisé en partie, faut-il préciser.

 

À la fois cycle et symphonie vocale, Das Lied von der Erde est constitué de six lieder avec orchestre : trois pour ténor et trois pour mezzo-soprano (ou contralto), en alternance. Les deux solistes ne chantent jamais ensemble. La partition autorise le remplacement de la voix de femme par une voix de baryton. Dietrich Fischer-Dieskau fut le premier, il y a 50 ans, à adopter cette formule, reprise occasionnellement depuis, au concert et au disque, et notamment par Nagano.

Les trois lieder pour ténor chantent l'ivresse et la jeunesse, les trois lieder pour voix grave (de femme ou d'homme) pleurent la solitude de l'être humain et mènent à l'adieu final, ce sixième lied intitulé Der Abschied qui dure à lui seul autant que les cinq lieder précédents.

À l'OSM, Nagano avait confié la partie de baryton à l'Allemand Christian Gerhaher, qui chanta les deux soirs, tel que prévu. Le ténor annoncé était un Lituanien inconnu du nom d'Edgaras Montvidas qui, au dernier moment, fut remplacé par l'Américain Stuart Skelton, inconnu lui aussi, sauf qu'il arrivait précédé d'un enregistrement de 2007 de Das Lied dans la version ténor-baryton, avec Thomas Hampson et l'Orchestre Symphonique de San Francisco, dir. Michael Tilson Thomas. Skelton chanta lui aussi les deux soirs mais fut remplacé, pour l'enregistrement et pour la tournée européenne de l'orchestre, en avril, par l'Allemand Klaus Florian Vogt.

Le disque qui vient de paraître contient donc : a) les trois lieder pour baryton chantés par Gerhaher à Wilfrid-Pelletier; b) les trois lieder pour ténor greffés dans un studio de Munich par Vogt en surmixage sur une bande enregistrée par l'OSM seul en studio à Montréal.

Ouf ! Bien des complications pour un résultat qui, finalement, ne change rien à une discographie de Das Lied où abondent les grandes et très grandes versions, dont au moins six, avec des chanteurs différents, dirigées par Bruno Walter, qui créa l'oeuvre en 1911.

Gerhaher apporte une voix superbe et une totale expression à ses trois lieder, mais sans faire oublier le timbre d'une Kathleen Ferrier dans la version courante avec voix de femme. Vogt est moins intéressant comme chanteur et comme interprète et Nagano dirige un OSM profond et coloré mais non exceptionnel. Vogt fond bien sa voix avec l'orchestre préenregistré, mais, étrangement, la voix de Gerhaher, captée en public, possède plus de présence.

MAHLER

Das Lied von der Erde.

Klaus Florian Vogt, ténor, Christian Gerhaher, baryton, Orchestre Symphonique de Montréal, dir. Kent Nagano.

OSMCD-7436

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