L'Ensemble Contemporain de Montréal et l'Orchestre de chambre McGill n'ont, que je sache, absolument rien en commun: ils appartiennent à des générations différentes, ils oeuvrent dans des milieux différents, ils ont chacun leur répertoire.

Quelqu'un a eu l'idée de les réunir en un concert conjoint. En fait, il s'agissait de l'événement-bénéfice annuel de l'ECM, auquel s'adjoignait l'autre formation, davantage identifiée au milieu anglophone. À l'exception de deux pièces, le programme entier fondait les deux formations en une seule de 32 musiciens dirigée tour à tour par les titulaires respectifs, Véronique Lacroix et Boris Brott.

Passe encore pour ce mariage inattendu, qui eut au moins le mérite d'attirer plus de 600 personnes à Pierre-Mercure. Ce que je n'ai pas compris - et je ne suis pas le seul! - , c'est le «scénario» entourant la suite en cinq mouvements Ma Mère l'Oye de Ravel, qu'on avait interrompue en plein milieu pour y placer quatre «créations» de jeunes compositeurs d'ici.

Intitulé Jardin féerique, d'après le titre du dernier mouvement de la suite de Ravel, le spectacle mettait en scène un infirmier poussant dans un fauteuil roulant un malade dont on ne voyait que la tête, une tête énorme, qui parlait et se plaignait (en français et en anglais!), une tête que l'infirmier détachait et prenait dans sa main pour en examiner l'intérieur (!), etc. Répugnant, c'est le moins qu'on puisse dire.

Pour la tête, on avait reconnu le pauvre Ravel. Pour la voix, il était clair qu'il s'agissait de l'infirmier. Celui-ci aurait dû porter un masque et créer ainsi l'illusion souhaitée! À la toute fin, l'infirmier revient, en complet de ville et «portant» la tête de Ravel par-dessus la sienne. Ouf! Je m'arrête là.

Peu à dire sur les pièces nouvelles, qui ressassent des formules usées à la corde. Paul Frehner montre un certain sens du mouvement, Maxime McKinley évoque avec ses flûtes à bec le monde des jouets, Katia Makdissi-Warren passe d'un très long solo de harpe à quelque mauvais orchestre tzigane et Nicole Lizée donne, à son tour, dans le minimalisme. En fin de compte, les meilleurs moments de la soirée viennent de la musique de Ravel, dirigée avec subtilité par Mme Lacroix et M. Brott.

_______________________________________________________________________________________

ENSEMBLE CONTEMPORAIN DE MONTRÉAL et ORCHESTRE DE CHAMBRE McGILL. Chefs d'orchestre: Véronique Lacroix et Boris Brott. Matthias Maute, flûtiste, Caroline Lizotte, harpiste, et Philippe Racine, comédien. Mercredi soir, salle Pierre-Mercure.