L'Orchestre symphonique de Montréal a reconquis son public parisien, mardi soir, à la faveur d'un concert unique dans la prestigieuse salle Pleyel.

L'OSM s'y produisait dans le cadre de sa première tournée européenne depuis que le chef Kent Nagano en a pris la direction. De l'Espagne à l'Autriche, cette tournée de 14 représentations, qui se termine mercredi au Luxembourg, a conduit l'orchestre dans six pays et 12 villes. Un peu partout, l'OSM a joué devant des salles combles et enthousiastes, indique-t-on. Mais Paris était un passage obligé, une sorte d'épreuve, que la formation montréalaise, qui cherche à «se repositionner» en Europe, a réussi haut la main.

Il faut dire que Kent Nagano est parvenu à surprendre les mélomanes de Pleyel, une belle salle art déco de 1900 places presque pleine mardi soir. L'OSM étant surtout réputé, depuis Charles Dutoit, pour sa maîtrise du répertoire française du 19e siècle, l'orchestre a ouvert le concert avec les Nocturnes 1 et 2 de Debussy. Mais il a ensuite opté pour une rupture de ton, en jouant, pour l'unique fois de cette tournée, Orchestral Theatre I : O, du Chinois Tan Dun (le compositeur de la musique du film Tigre et dragon).

La pièce marie la tradition asiatique et les dissonances de la musique contemporaine occidentale. Les musiciens crient, murmurent, soupirent, tapent sur leurs instruments On se demandait comment le public de Pleyel allait réagir. Il a beaucoup aimé. Longuement ovationnée, l'oeuvre a suscité l'enthousiasme des spectateurs.

La pièce maîtresse de la soirée était Le Chant de la terre de Malher, avec le ténor Klaus Florian Vogt et le baryton Christian Gerhaher. Cette uvre est la première que Kent Nagano a enregistrée avec l'OSM. Sorti lundi en France, le disque marque le retour de l'orchestre québécois sur le devant de la scène. Quelques critiques ont parlé d'une interprétation très «réfléchie», voire «cérébrale». Ils n'avaient pas tort. En entrevue avant le spectacle, Nagano expliquait qu'il avait voulu peser chaque mot, dans la «grande tradition des lieders».

«Les mots, et ce qu'il y a derrière les mots, sont tellement beaux qu'on se devait de faire une uvre dans la tradition du lieder. Comment on illumine et accompagne ces mots demande beaucoup de réflexion. C'est complexe», a-t-il dit .

La directrice générale de l'OSM, Madeleine Carreau, rappelait que l'OSM avait cherché à la faveur de cette tournée à «se repositionner» sur le marché européen, après le départ de M. Dutoit et la période de turbulences qui a suivi. Elle estime que l'objectif a été atteint et que l'orchestre, maintenant qu'il a réussi son retour en Europe, est de nouveau un «acteur majeur sur la scène internationale».

La tournée européenne de l'OSM l'a conduite en Espagne, en Allemagne, en Autriche, en Croatie, au Luxembourg et en Croatie. Elle a coûté 3,8 millions $.