Marie-Nicole Lemieux consacre son dernier disque à Schumann, choisissant comme oeuvre principale le cycle Frauenliebe und Leben («L'Amour et la Vie d'une femme»), l'un des sommets du répertoire intime pour voix féminine qui, en huit lieder, décrit différentes étapes de la vie d'une femme.

Notre chanteuse très médiatisée chante aussi l'un des deux recueils portant le simple titre de Liederkreis (c'est-à-dire «Cycle de mélodies»), soit l'op. 39, qui contient 12 lieder. Elle complète son disque avec cinq lieder provenant de différents recueils, notamment le célèbre Widmung (traduit ici par «Don de soi») et ce terrifiant Löwenbraut («La fiancée du lion») qui est presque un petit opéra en neuf minutes.

 

Je n'arrive pas à aimer ce disque, bien que je l'aie réécouté plusieurs fois. Marie-Nicole Lemieux avait chanté Frauenliebe und Leben chez Turp en 2002 et le Liederkreis au LMMC en 2006, donnant, chaque fois, une interprétation valable. Cette fois, je n'ai pas été ému un seul instant. La voix est devenue trop grosse pour le lied, le discours manque de sobriété, la chanteuse surcharge le texte comme si elle chantait de l'opéra, alors que l'art de la mélodie réside dans la façon subtile de mettre les mots en valeur.

Son approche extérieure convient au scénario de la petite fille qui pénètre dans la cage du lion et caresse l'animal comme elle caresserait un chat... jusqu'à ce que la tragédie éclate. Pour le reste, il ne se passe pas grand-chose; on s'ennuie même passablement. Concernant la voix, c'est encore un somptueux mezzo qu'on écoute, bien que la chanteuse plante ici et là quelques graves bien sonores qui pourraient être ceux d'un contralto.

Au surplus, le programme est mal réparti: Frauenliebe und Leben, l'oeuvre majeure ici, devrait ouvrir le disque au lieu d'être placé au milieu. Le pianiste Daniel Blumenthal est bon, sans plus. Même chose pour la prise de son, réalisée au Domaine Forget l'automne dernier.

La discographie de Frauenliebe und Leben est considérable et contient des versions plus décevantes encore que celle de Marie-Nicole Lemieux. Mais il en existe une qui est restée absolument inégalée: c'est celle de Kathleen Ferrier, réalisée en 1950 avec John Newmark, chez Decca. Elle sonne encore parfaitement bien et, surtout, elle nous apporte une émotion qui, bien que sobre et contrôlée, tire les larmes.

_______________________________________________________

MARIE-NICOLE LEMIEUX, MEZZO-SOPRANO: SCHUMANN

NAÏVE, V 5159

**