Ce qu'il y a de moins bon, dans ce concert, c'est ce qui était le plus attendu, en tout cas ce qui avait été le plus médiatisé: le concerto pour violon électrique de John Adams. Ce qu'il y a de meilleur, disons plutôt de moins désolant, c'est tout ce qui précède.

On le sait, le fameux compositeur américain de 62 ans s'affaire aussi comme chef d'orchestre. Mince et grand, il reste sobre devant l'orchestre et ne semble pas se prendre pour le maestro du siècle. Et ce qu'il tire de l'orchestre est plus qu'écoutable.

 

Il ouvre son programme avec les Four Sea Interludes placés à quatre moments différents du sombre opéra Peter Grimes de Britten et sait recréer l'atmosphère de chacun, malgré une tendance à confondre les rythmes du dernier, Storm, avec West Side Story.

On passe ensuite à Sibelius: sixième Symphonie, l'une des moins jouées, sans doute parce que la plus abstraite. Les groupes orchestraux - dont les cordes en divisi - se répondent en répétant interminablement les mêmes petits motifs. Cette espèce de minimalisme précoce est sans doute ce qui, dans Sibelius, a intéressé M. Adams.

L'orchestre joue bien, comme dans le Britten, mais sans inspiration. Je préfère évoquer cette date de notre histoire musicale: 15 et 16 janvier 1952, première exécution de l'oeuvre à l'OSM, salle du Plateau. Qui tenait la baguette? L'illustre Sir Thomas Beecham. Et qui a-t-on aujourd'hui? John Adams.

Après l'entracte, M. Adams dit quelques mots - en anglais - sur le reste du programme. Percy Grainger a imaginé un petit gamelan dialoguant avec les cordes pour son orchestration de La Vallée des cloches, de Ravel. Fort bien, mais sans conséquence. Même chose pour le concerto «électrique» de M. Adams. Le compositeur et chef était venu ici en 2002 diriger la même Leila Josefowicz dans son concerto pour violon «ordinaire». Le nouvel instrument a six cordes mais n'a pas de caisse et il est considérablement amplifié. Quant au contenu musical, il se ramène à un interminable solo de 24 minutes, du genre improvisation tzigane, qui conduit à un crescendo presque aussi vulgaire que le maintien de la soliste, le tout accompagné par un orchestre plutôt amorphe.

De deux maux, John Adams compositeur ou John Adams chef d'orchestre, on choisira finalement le moindre, c'est-à-dire le second.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: John Adams. Soliste: Leila Josefowicz, violoniste. Hier soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts; reprise ce soir, 20h. Série «Grands Concerts». Programme: Four Sea Interludes, op. 33a, de l'opéra Peter Grimes (1945) - Britten Symphonie no 6, en ré mineur, op. 104 (1923) - Sibelius La Vallée des cloches, ext. de Miroirs pour piano (1905) - Ravel, orch. Grainger (1944) The Dharma at Big Sur, pour violon électrique et orchestre (2003) - Adams