L'événement final de Montréal/Nouvelles Musiques, édition 2009, dimanche soir, était double et illustrait le véritable culte que le directeur artistique Walter Boudreau voue à la musique du regretté Claude Vivier. Un choeur mixte de Paris, Les Jeunes Solistes, consacrait à Vivier un programme d'une heure et demie, que précédait un récital d'une demi-heure où une mezzo torontoise, Wallis Giunta, chantait quatre nouvelles pièces que le personnage de Vivier a inspirées à de jeunes compositeurs canadiens inconnus.

Moins heureuse cependant, l'idée d'associer le 400e anniversaire de Québec au souvenir de Vivier. On peut d'ailleurs passer vite sur ce «prélude»: les pièces sont de vagues imitations de Vivier, avec parlando, cris, murmures et silences; la chanteuse est simplement convenable et son français ne l'est pas.

 

Les Jeunes Solistes - 10 hommes et 10 femmes - ont chanté trois oeuvres de Vivier dont deux très longues: Chants, qui fait 21 minutes, et Journal, qui en fait 45. Cette musique est à la fois travaillée dans le détail, plastiquement très belle, extrêmement difficile à chanter et très hermétique pour l'auditeur moyen. Vivier y mêle bouts de phrases de la messe de Requiem, éclats de rire, petits et gros bruits de percussions. Si je suis finalement venu à la musique instrumentale de Vivier, sa musique vocale me rebute encore.

Heureuse initiative, quand même, cet événement final. Vivier, peu joué de son vivant, serait heureux de savoir que non seulement on vient de Paris pour chanter sa musique chez lui, où il la composa, mais qu'on écrit maintenant des oeuvres inspirées par les siennes.

Chorum samedi

L'Ensemble Chorum a fait salle comble au Bon-Pasteur samedi soir - à 21 h 30. L'heure du concert était inhabituelle. Le programme l'était aussi, c'est le moins qu'on puisse dire. «Manifestes sonores» (le titre donné au programme) se voulait, selon les deux directeurs artistiques, «un acte contre l'uniformisation sous toutes ses formes et un hymne à la liberté». Pas question, ici, de «joli son», pour les citer encore. Les pièces étaient d'ailleurs assorties de vidéos et mini-discours à couleur «politique». Le geste pouvait paraître naïf. Mais il était sincère, j'en suis sûr. Les 150 personnes présentes ont d'ailleurs eu droit à deux «créations mondiales» - les seules, sans doute, à s'en rendre compte.

Choix discutables dans un tel contexte, ces deux classiques que sont Densité 21.5, pour flûte seule, de Varèse, et Psappha, pour percussions, de Xenakis, joués respectivement par l'impeccable Jocelyne Roy et l'époustouflant Olivier Maranda, sonnaient comme de la «vieille» musique... mais surtout comme de la «vraie» musique, à côté du reste!

La pièce de Charles-Antoine Fréchette (l'un des deux directeurs artistiques) mêle battements d'ailes de pigeon (!) et soupirs de la flûte. Jouant Helmut Lachenmann, Raphaël Dubé (l'autre directeur artistique) chatouille son violoncelle et n'en tire à peu près rien d'autre qu'une épaisse séquence de doubles cordes. Wolf Edwards demande aux archets de glisser sur des cymbales avant de retrouver violon, alto ou violoncelle. Nicholas Gilbert arrache à la clarinette-basse de Hubert Tanguay-Labrosse des sons absolument terrifiants que prolonge une vidéo de Joëlle Tremblay où des bouches grandes ouvertes aux dents jaunes poussent des cris horribles.

Dmitri Kourliandsky joue lui aussi sur le visuel: les archets fouettent l'air plutôt qu'ils ne frottent les cordes. On voit même quelqu'un debout devant un piano, un archet dans la bouche et jouant dans le piano avec un autre archet. Le numéro provoque un «chou!» au balcon. Je m'arrête là.

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ENSEMBLE CHORUM. Samedi soir, Chapelle historique du Bon-Pasteur. LES JEUNES SOLISTES. Dir. Rachid Safir. Dimanche soir, salle Pierre-Mercure. Dans le cadre de Montréal/Nouvelles Musiques.