Deux violonistes allemandes se produiront chez nous prochainement. La nouvelle venue Arabella Steinbacher, 27 ans, donnera un récital à Pro Musica le 2 février, cependant que la célèbre Anne-Sophie Mutter qui, à 46 ans, pourrait être la mère de l'autre, revient à l'OSM les 10 et 11 février après une longue absence.

Deux récentes parutions accompagnent ces visites.

Chez Orfeo, Steinbacher propose un programme français: Sonate de Poulenc, Sonate de Ravel (la grande de 1923-27 et non l'oeuvre de jeunesse en un mouvement), Tzigane, du même Ravel, et première Sonate de Fauré, en la majeur, op. 13. Tout cela avec le même pianiste, Robert Kulek, qu'on retrouvera le 2 février. À noter que le programme de Montréal comprendra une seule de ces oeuvres: la Sonate de Ravel.

 

À l'OSM, Mutter reprendra le populaire Concerto de Mendelssohn. Pour l'instant, chez Deutsche Grammophon et avec l'Orchestre Symphonique de Londres dirigé par Valery Gergiev, elle joue le très long concerto In tempus praesens que la compositrice russe Sofia Gubaidulina a écrit à son intention et qu'elle a créé à Lucerne en 2007.

Dans sa présentation, Mutter parle de l'«étroite parenté spirituelle» entre Bach et Gubaidulina qui l'a incitée à compléter le disque avec deux concertos du Cantor. En fait, les deux Bach, les BWV 1041 (la mineur) et 1042 (mi majeur), ouvrent le disque. Mutter les joue avec un ensemble appelé Trondheim Soloists, qu'elle dirige de l'archet, mais sur lequel la pochette ne fournit aucun renseignement.

La nouveauté du disque, c'est, bien sûr, le Gubaidulina, qui fait 33 minutes sans interruption. Il s'agit d'un grand monologue tour à tour extatique et tumultueux qui met l'accent sur les prouesses violonistiques plutôt que sur l'expression. L'orchestre est très coloré mais s'efface trop souvent au profit du violon.

Le meilleur moment du disque, c'est le Bach. Mutter aborde cette musique en romantique, mais avec sobriété et dans une sonorité très fine; elle parvient même à émouvoir dans les mouvements lents.

Steinbacher possède, comme son aînée, une maîtrise absolue du violon. Elle suit fidèlement toutes les indications du texte et son pianiste est lui aussi attentif à tous les détails. Le Poulenc possède fantaisie et force, les deux Ravel sont éblouissants et pleins d'imagination (le mouvement intitulé Blues de la sonate est nonchalant, comme il se doit) et le Fauré chante bien, sans toutefois l'abandon auquel nous ont habitués les meilleurs interprètes français de cette musique. La violoniste omet d'ailleurs la reprise au premier mouvement du Fauré.

ARABELLA STEINBACHER, VIOLONISTE: POULENC, RAVEL, FAURÉ

ORFEO, C 739 081 A

ANNE-SOPHIE MUTTER, VIOLONISTE: GUBAIDULINA, BACH

DEUTSCHE GRAMMOPHON, 4 777 450

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