Deux heures où l'on bascula d'un extrême à l'autre. On peut résumer ainsi le programme que Jean-François Rivest dirigeait cette semaine à l'OSM (mardi soir, avec reprise hier matin).

Le chef en résidence ouvrait les opérations avec de délicats contes de fées de Ma Mère l'Oye de Ravel narrés dans un minimum de gestes et des sonorités d'une incroyable finesse, et terminait sur un bouillonnant Don Juan de Strauss où, carrément à l'assaut de l'orchestre tout entier, il poussa celui-ci aux limites de sa virtuosité et de sa puissance sonore.

 

La chironomie extrêmement animée que déploie Rivest dans le Strauss n'a rien du cabotinage, même s'il fait en un seul concert plus de gestes que n'en fait Nagano en une dizaine. La musique qui vit en lui s'extériorise ainsi, tout simplement, et cette multiplicité de mouvements inspire spectateurs comme musiciens. On croit voir le fameux séducteur en même temps qu'on entend le riche poème symphonique! Et Rivest ne néglige pas pour autant les épisodes rêveurs et tendres de la partition.

Après le Ravel, il avait fait une autre incursion en territoire français impressionniste avec le Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy. Comme pour Ravel, même extrême raffinement sonore de l'orchestre, sur lequel planait la flûte enchanteresse de Timothy Hutchins.

La jeune soprano Hélène Guilmette, frais sourire, belle personnalité, voix claire et juste, chanta deux Bach et deux Mozart. De Bach: un air de la Cantate du café, avec humour, et l'autre, plus grave, d'une cantate sacrée. De Mozart, un monologue très senti de la Susanna des Nozze di Figaro fut suivi d'un très long air de concert axé sur la virtuosité. La virtuosité y était mais le suraigu était parfois atteint de justesse.

L'autre soliste, Brian Manker, violoncelle-solo de l'orchestre, donna des Variations sur un thème rococo de Tchaïkovsky une interprétation de grande classe, toujours belle et égale au plan sonore, toujours musicale aussi, avec juste ce qu'il faut de fantaisie, de rubato et d'émotion.

Deux autres premiers-pupitres sont à signaler: le hautboïste Theodore Baskin dans un des Bach et le nouveau co-violon-solo Andrew Wan, irréprochable dans de nombreuses interventions où l'on n'osait imaginer son coéquipier bien connu. Le concert était donné devant la fosse d'orchestre restée ouverte. Poursuite des tests d'acoustique, explique l'OSM.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: Jean-François Rivest. Solistes: Hélène Guilmette, soprano, et Brian Manker, violoncelliste. Mardi soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts.