Faire salle comble à Wilfrid-Pelletier avec la Messe en si mineur n'était pas chose assurée. On a vu vendredi soir que cela était possible. Et l'on prévoit le même succès pour la reprise cet après-midi.

Parce que, au départ, l'idée de Kent Nagano était originale: présenter le chef-d'oeuvre de Bach dans le cadre des séries de l'OSM, mais avec une formation baroque, l'orchestre et le choeur Tafelmusik, de Toronto, et des solistes d'Europe. Comme si Montréal se trouvait, tout à coup, au confluent de deux cultures.

 

Les effectifs réduits de Tafelmusik (35 instrumentistes, 31 choristes) et l'emploi du diapason baroque (415) appelaient une exécution intime et sobre, proche d'une certaine recherche musicologique, et c'est ce que nous avons vu pendant ces deux heures.

Pour les archives: c'est la première fois que Nagano dirige à Montréal autre chose que l'OSM! Il fait très peu de gestes; parfois, il demeure immobile. On en conclut que le travail a été fait en répétition. Fidèle au style baroque le plus courant, il prend vivement les mouvements rapides et évite toute emphase dans les mouvements lents. Mais, n'étant pas un spécialiste du baroque, il se montre trop prudent et ne s'investit pas suffisamment dans ce qui est «vivace» et dans ce qui est «andante». Résultat: sa lecture génère une certaine monotonie.

La nouvelle conque blanche installée sur la scène clarifie le son des voix et des instruments d'une façon appréciable mais non entièrement convaincante. La virtuosité du choeur, presque continuellement sollicité ici, reste pourtant évidente, notamment dans les longues séquences fuguées et les rapides mélismes. À l'orchestre, les instruments dits «d'époque» sonnent bien, sauf le cor naturel.

En passant, on reconnaît plusieurs instrumentistes et choristes montréalais dans cette formation basée à Toronto.

La partition comporte cinq voix solistes. Comme c'est la coutume, Nagano en prend quatre et partage les trois voix féminines entre deux chanteuses. Toujours dans l'esprit baroque, les solistes adoptent un style sobre et évitent le vibrato prononcé. Tous se mêlent bien à l'ensemble sauf le ténor, qui chante faux. Assis à gauche de la scène, ils viennent à l'avant pour leurs solos ou duos et vont se placer dans l'orchestre pour les airs chantés avec l'intervention d'un instrument.

»MESSE EN SI MINEUR», pour voix solistes, choeur et orchestre, BWV 232 (1724-50) - J. S. Bach Tafelmusik Baroque Orchestra and Chamber Choir. Chef invité: Kent Nagano. Solistes: Sibylla Rubens, soprano, Renata Pokupic, mezzo-soprano, Christoph Genz, ténor, et Detlef Roth, basse. Vendredi soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts; reprise auj., 14h30. Présentation: OSM, Série «Signature».