La Société de musique de chambre de Montréal ne s'est guère manifestée depuis sa formation d'ailleurs assez récente. Vendredi soir, au Bon-Pasteur, sa fondatrice et directrice artistique, la jeune violoncelliste bulgare Velitchka Yotcheva, s'adjoignait le pianiste français Patrice Laré et le violoniste québécois Jean-Sébastien Roy pour un programme qui retenait l'attention: les deux Trios élégiaques de Rachmaninov encadrant le Trio op. 67 de Chostakovitch.

Programme russe, donc, avec tout ce que le genre comporte d'émotion lourde. Cette musique très proche de notre sensibilité avait attiré une salle comble, malgré la présence d'un autre concert au calendrier, malgré la tempête et malgré l'approche de Noël.

 

J'ai retrouvé le nom de Velitchka Yotcheva comme membre d'un certain Trio Rachmaninov présenté par Pro Musica le 12 mai 1997. Le pianiste était déjà Patrice Laré, mais le violoniste était différent.

Le pianiste Laré s'était révélé le seul élément valable du défunt Trio Rachmaninov et vendredi soir, c'était encore lui le plus fort, comme technicien et comme musicien. On l'apprécia comme meneur de jeu; j'irais jusqu'à dire que les nombreuses séquences que Rachmaninov confie au piano isolé furent les seules à nous apporter un plaisir musical sans problèmes.

Ce qu'on a entendu au violoncelle et au violon était quand même meilleur que dans la formation précédente. La violoncelliste joue maintenant plus juste et le violoniste est un chambriste décent. Néanmoins, par rapport au piano, les deux archets restent timides, voire faibles techniquement, et devront s'affirmer davantage, sans quoi le trio tel qu'il s'est présenté vendredi n'a aucun avenir.

Les trois oeuvres au programme sont tellement riches qu'elles passent la rampe, même dans des lectures aussi insuffisantes. L'affection que leur portent les trois coéquipiers est évidente. Mais l'interprétation se situe au-dessus des bonnes intentions. Il reste encore beaucoup de travail à faire: au plan technique chez les deux cordistes et au sein de l'ensemble en ce qui concerne la conception collective, la coordination élémentaire et l'équilibre sonore.

Le premier Rachmaninov, en un seul mouvement, tenait en 14 minutes. Le second, en trois mouvements, fut joué avec toutes les reprises et totalisa 46 minutes. Pour le Chostakovitch, j'ai compté 28 minutes.

J'ai aussi noté que le piano Bösendorfer utilisé vendredi commença à perdre son accord au deuxième mouvement du second Rachmaninov. Mais le pianiste n'était responsable ni de cela, ni du reste.

PATRICE LARÉ, pianiste, JEAN-SÉBASTIEN ROY, violoniste, et VELITCHKA YOTCHEVA, violoncelliste. Vendredi soir, Chapelle historique du Bon-Pasteur. Présentation: Société de musique de chambre de Montréal.

Programme: Trio élégiaque no 1, en sol mineur (1892) - Rachmaninov

Trio no 2, en mi mineur, op. 67 (1944) - Chostakovitch

Trio élégiaque no 2, en ré mineur, op. 9 (1893) - Rachmaninov