Événement spécial à l'Orchestre Symphonique de Montréal cette semaine: un concert de musique d'aujourd'hui, placé salle Maisonneuve où il fit presque salle comble (ce qui était moins sûr à W.-P.), partagé entre deux chefs et offrant cette chose rarissime qu'est la reprise d'une oeuvre commandée et créée ici.

C'est-à-dire qu'au lieu de l'habituelle première-dernière, on réentendait le Concerto pour violon que Dutoit avait commandé au regretté André Prévost, et joué par la même Chantal Juillet qui le créa en 1998.

 

Ce fut le grand moment de ce très - et trop - long concert qui se termina passé 22 h 30. Le Concerto de Prévost s'écoute encore avec un intérêt presque continuel. Dans une forme absolument égale à ce qu'elle était il y a 10 ans, notre violoniste livra avec autorité et musicalité cette envoûtante rêverie à peu près ininterrompue - 33 minutes à la création, 34 mercredi soir - ponctuée de riches dissonances orchestrales et débouchant sur une conclusion originale. L'archet s'arrête mais le violon continue de se faire entendre. Les dernières minutes ont simplement été pré-enregistrées par la violoniste.

L'exécution était précédée d'un très beau documentaire de James Dormeyer sur la préparation de cette création. Le compositeur était venu sur scène en 1998. Mercredi, on a remis des fleurs à sa veuve Lise.

La Finlandaise Susanna Mälkki, la nouvelle directrice de l'Ensemble Intercontemporain de Paris, dirigea le Prévost avec toute la conviction souhaitée. Précédemment, elle avait redonné au Lontano de Ligeti ce parfait caractère de «statisme continu» dont parle Marc Vignal.

Trois oeuvres suivaient l'entracte, toutes confiées à Walter Boudreau, le chef de la Société de musique contemporaine du Québec, efficace à sa façon, mais n'ayant hélas! pas la sobre tenue de Mme Mälkki.

La pièce similiminimaliste de Paul Frehner, l'un des lauréats du récent Concours de composition de l'OSM, exploite trois fois une importante idée rythmique piquée chez Stravinsky. Celle de Steve Reich sur New York, assortie d'un film, est prétentieuse et exaspérante. Cet homme a un immense talent: celui de faire croire qu'il en a. On termine sur Orion, de Claude Vivier. On sent que Boudreau et l'orchestre y mettent le maximum. Mais notre concentration est difficile, après ces deux heures de très solide écoute.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chefs invités: Susanna Mälkki et Walter Boudreau. Soliste: Chantal Juillet, violoniste. Mercredi soir, salle Maisonneuve de la Place des Arts. Programme: Lontano (1967) - Gorgy Ligeti Concerto pour violon et orchestre (1998) - André Prévost Lila (2006) - Paul Frehner City Life (1995) - Steve Reich Orion (1980) - Claude Vivier