Trafic de mots, trafic de sons, trafic de gens, traficotage... Trafic. Lancé vendredi sous étiquette Barclay/Universal, Trafic est le troisième opus solo de Gaëtan Roussel, aussi chanteur de Louise Attaque. Le parolier, compositeur, interprète devient ici chroniqueur de toutes circulations humaines, circulations de l'extérieur comme de l'intérieur.

«C'est une manière d'évoquer tous ces échanges et croisements vécus à travers la création de cet album», résume Gaëtan Roussel, joint à Paris.

Après Ginger (2010), Orpailleur (2013) et Accidentally Yours en duo avec Rachida Brakni (2017), la vie artistique hors groupe de Gaëtan Roussel se poursuit avec Trafic, élaboré de mai à décembre 2017, après une première étape d'atelier d'écriture.

«Je participe régulièrement à de tels ateliers, mais ce n'est pas pour aller y écrire un album... Or, j'ai rencontré cette fois des gens qui ont provoqué le début de cet album. Il faut saisir de telles occasions [...], ces choses qui ne se passent pas comme on l'avait prévu», explique-t-il.

Rencontres

À Los Angeles, Gaëtan Roussel a fait la connaissance de deux musiciens: l'Australien Justin Stanley (Beck, Jamie Lidell) et le Suédois Jonas Myrin.

«J'ai d'abord passé trois jours de studio avec eux; deux chansons, deux idées de direction. Je suis allé les revoir quelques fois par la suite. Justin a un studio très agréable à Los Angeles et j'avais envie de voir du pays. Parallèlement, j'ai travaillé avec un jeune Français : DJ Dimmi. J'ai ensuite ramené tout ce que j'avais fait ici et là.»

La matière brute de Trafic fut traitée au studio du réalisateur Antoine Gaillet, collaborateur de Miossec, Fishbach et Julien Doré, avec qui Gaëtan Roussel a enregistré Lady Sir aux côtés de la comédienne et réalisatrice Rachida Brakni. Ainsi, Gaillet a eu pour tâche de gérer ce trafic commenté par Roussel.

«J'aime sa vision de la musique, je sais qu'elle peut aller dans un sens comme dans un autre. Il a dû faire des choix avec un tas de mots et de sons.» 

«Il a fallu qu'il ordonne, qu'il choisisse ce qu'on gardait et ce qu'on ne gardait pas. Il fut primordial dans le rendu souhaité au départ et la réflexion s'est terminée avec lui», ajoute Gaëtan Roussel à propos de son réalisateur.

Selon le principal intéressé, Trafic est un retour à une approche « accueillante », la matière y est clairement balisée.

«Musicalement, Orpailleur était un album plus introspectif. Je ne dirais pas que cet album était expérimental, le mot est trop fort, mais [...] les mots se tenaient avec les sons comme des châteaux de cartes. Alors que Trafic est un album de chansons guitare-voix avec des mélodies dont on se souvient. Elles comportent aussi quelque chose de dansant, une production rythmée. J'aime que la musique entre aussi par les pieds.»

Plus «précis», plus «défini»

Côté textes, Gaëtan Roussel dit être revenu à l'écriture de sujets plus définis :

«C'est moins impressionniste qu'OrpailleurHope, c'est sur l'oubli, la mémoire. Des exemples? Ne tombe pas, c'est sur la dépendance. Le duo avec Vanessa Paradis, c'est sur l'usure, sur l'absence pendant la présence, tout ce qui se patine entre les êtres... "Tu me manques, pourtant tu es là" est une phrase dure. J'entends des voix, c'est sur tout ce qu'on a à l'intérieur de soi, c'est un clip qu'il me faudrait tourner en camisole de force! [rires]»

Les mots de Trafic peuvent être durs ou mélancoliques, les sons en contrebalancent l'effet, pense leur concepteur.

«Les textes qui ne sont pas tendres passent souvent par des musiques qui se dansent. Mais je n'invente rien. J'ai d'ailleurs procédé ainsi avec mes camarades de Louise Attaque.»

Grosso modo, conclut Gaëtan Roussel, Trafic est un album plus accessible qu'Orpailleur, les références au programme y sont intégrées par la majorité.

«Il y a des choses plus précises dans les textes et les musiques sont plus définies, avec plus de riffs et des choses très rythmées, plus de chaleur acoustique. Sur Orpailleur, il y avait une certaine froideur dans les sons électroniques, alors que cette fois, je n'avais pas envie de mettre les guitares au fond du mix. Il y a de la place pour fredonner, pour danser, des mots qui reviennent, des mélodies qui restent en tête.»

La résultante sur scène s'amène en novembre, Gaëtan Roussel souhaite vivement en présenter la matière au Québec l'an prochain. Il reprendra des titres de Ginger, moins d'Orpailleur, surtout de Trafic. La circulation s'annonce intense, mais notre chroniqueur compte bien nous faire éviter les bouchons.

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CHANSON. Trafic. Gaëtan Roussel. Barclay/Universal.

Image fournie par Barclay/Universal

Trafic, de Gaëtan Roussel