Rencontrer Jain au restaurant haïtien Agrikol colle particulièrement à son parcours de voyageuse et à sa musique dansante multicolore. Surtout qu'elle aime bien le groupe des propriétaires de l'établissement, Arcade Fire.

Alors que la canicule frappe Montréal - nous sommes en plein Festival de jazz -, l'artiste française s'apprête à monter sur scène pour deux soirs au MTELUS, à guichets fermés. Ensuite, elle doit se produire à Sherbrooke et au Festival d'été de Québec pour la première fois.

Or, la globe-trotteuse de 26 ans est devant nous pour discuter de Souldier, son deuxième album attendu de pied ferme à la fin du mois d'août.

«Cet album, je l'ai beaucoup écrit en tournée et dans le tour bus. Du coup, je trouve cohérent de le sortir d'abord en tournée. Comme les vieux groupes de rock, je le travaille d'abord live sur scène.»

Entre ses deux albums, Jain s'est accordé une pause d'un mois. «Je suis partie à Cuba. C'était trop bien. J'ai même écrit là-bas la chanson Dream

Jain a donné plus de 210 spectacles après la sortie de Zanaka, en novembre 2015. Forcément, la scène a influencé l'écriture musicale et le son de Souldier. «On devient addict aux gens qui dansent», indique-t-elle.

Jain a le rythme en elle. À 7 ans, quand ses parents lui ont demandé de choisir un instrument pour l'inscrire à des cours de musique, elle a choisi la batterie.

Cela s'entend sur Souldier, où Jain s'éclate autant sur des airs indiens et arabes que sur des rythmes plus hip-hop. «Je ne voulais pas me répéter et refaire des chansons à la Makeba et Come, mais plutôt explorer d'autres sonorités.»

Jeune, Jain a habité dans plusieurs pays du monde, vu l'emploi de son père pour une société pétrolière. Sur Souldier, elle a délaissé les sonorités africaines et son passé au Congo pour se plonger dans le chapitre de sa vie à Dubaï et Abou Dhabi. «C'est une autre part de ma vie que j'avais envie de raconter. Et celle de mon retour en France où j'écoutais beaucoup d'électro et de hip-hop.»

«Vivre dans des pays musulmans m'a beaucoup appris sur la tolérance, souligne-t-elle. On connaît peu la culture islamique, donc on ne peut pas juger l'autre. C'est ce que je dis dans ma chanson Abou Dhabi

Même équipe, nouveau son

Malgré des offres de réalisateurs américains, Jain a refait équipe avec Yodelice (Maxim Nucci) à la réalisation. Il est son mentor, celui qui l'a découverte.

Jain a aussi refait appel à Agnès B pour sa nouvelle tenue de scène officielle.

En intitulant le premier extrait Alright, Jain a fait un clin d'oeil à Kendrick Lamar, mais aussi à Lily Allen.

Quant au deuxième extrait, Star, on peut y noter une certaine influence de M.I.A. avec un flow rapide.

Au bout du compte, toutes les chansons de Souldier sont en anglais. «C'était plus cohérent», explique Jain.

Elle a écrit et composé la chanson-titre en très peu de temps, tout juste après avoir vu au bulletin télévisé la tuerie qui venait d'éclater dans une boîte de nuit LGBT à Orlando, en Floride, en 2016.

Sur une note plus ludique, Jain revisite l'indicatif musical du dessin animé Inspecteur Gadget dans sa chanson Inspecta. «La culture hip-hop est de prendre des vieux trucs et de les réactualiser», souligne-t-elle.

Stromae, Christine and the Queens, Lou Doillon et Jain. Nombreux sont les artistes francophones européens à percer le marché anglophone. «Il y a peut-être une génération moins complexée de chanter en anglais», note-t-elle. Des groupes comme Phoenix ont délié la langue des auteurs-compositeurs français.

À l'automne, Jain se produira dans plusieurs villes américaines (Los Angeles, San Francisco, Chicago), ainsi qu'au Canada (Vancouver, Toronto) et au Zénith de Saint-Eustache. Ensuite, c'est l'Angleterre, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Italie et l'Espagne.

À Jain le monde.

Photo Martin Tremblay, La Presse

Sur Souldier, Jain a délaissé les sonorités africaines et son passé au Congo pour se plonger dans le chapitre de sa vie à Dubaï et Abou Dhabi.