Il ne l'aurait jamais prévu il y a trois ans après sa victoire à La voix, mais le deuxième album que lance Yoan ce soir, Depuis longtemps, est en français. Entrevue sur plusieurs sujets: l'envol de sa carrière après La voix, son départ de Productions J, un voyage formateur à Nashville et l'importance d'avoir le coeur franc.

Après La voix

La dernière fois que nous avons interviewé Yoan, c'était au lendemain de sa victoire à La voix. Il était en compagnie de sa coach Isabelle Boulay. «Je crois que j'avais dormi une heure et demie», se souvient-il.

Le jeune homme devant nous a changé. Il a le regard vif et est presque volubile. Mais Yoan tient encore beaucoup à son intégrité et il dégage toujours une grande paix intérieure.

«Je demeure encore à Ferme-Neuve», souligne-t-il, soit son village situé près de Mont-Laurier.

«J'ai vécu dix ans en trois ans, lance le jeune homme de 22 ans. J'ai grandi autant du point de vue personnel que musical [...]. Je suis un petit gars choyé, privilégié dans la vie et protégé, je dirais...»

Yoan prononce de sages paroles. «Si la vie nous propose des choses, c'est parce que nous sommes capables de les faire. Je referais les choses de la même manière.»

Quitter Productions J

Difficile de ne pas avoir envie de revendre 130 000 albums - un exploit dans la conjoncture actuelle -, comme pour celui qu'il a sorti en 2015. Or, Yoan a décidé - comme Marie Mai récemment - de quitter Productions J - la boîte de Julie Snyder - et de bâtir son équipe.

Il peut compter sur un imprésario (Ian Tremblay), un distributeur (Select), une agence de promotion (Local 9) et une agence de tournée (evenko, rien de moins). «Ma maman est ma business manager», ajoute-t-il.

Intègre, assez introverti, Yoan aime avoir la possibilité de dire non. «J'ai déjà dit en entrevue que je suis parti de mon côté parce que j'avais la tête dure. Ce n'est pas cela... c'est plutôt que j'ai le coeur franc. Je ressens ce que je veux et je sais ce que j'ai à faire. Je n'ai pas besoin de quelqu'un pour me le dire.»

«Nous sommes tous uniques. Je dois faire les choses comme je les ressens pour rester unique», résume Yoan.

Il a même choisi une ballade - un choix non commercial - pour le premier extrait de son nouvel album.

Un album en français

Si on lui avait dit il y a trois ans qu'il sortirait un album en français en 2018, Yoan y aurait-il cru?

«Absolument pas, lance-t-il. J'aurais même gagé que non... Je me souviens que mon père me disait que j'étais capable. Je lui répondais: c'est ma vie, laisse-moi tranquille.»

Yoan a vu en spectacle à quel point son public aime l'entendre chanter dans la langue de Patrick Norman et non celle de Blake Shelton. «Au début, j'avais six chansons en français et six en anglais. Finalement, cela a déboulé en français...

«Le côté country francophone, je ne le connais pas bien. Je connais mieux le country américain, donc je fais comme du country américain en français», note-t-il.

Séance d'écriture à Nashville

Yoan s'est rendu à deux reprises à Nashville. Une première fois avec ses parents à l'âge de 16 ans. «Un de mes oncles m'avait dit: profites-en, car la prochaine fois que tu vas y retourner, ce sera par affaires.»

L'oncle avait vu juste. La deuxième fois que Yoan s'est rendu dans la capitale de l'État du Tennessee, c'était en 2015 pour une séance d'écriture avec des pros du country, dont Marti Frederiksen - (Aerosmith, Carrie Underwood), Lindsey Lee (Steven Tyler, ancienne choriste de Miley Cyrus), Elisha Hoffman (Shania Twain, Dixie Chicks), ainsi que Rebecca Howard, qui a chanté sur des albums de Dolly Parton, en plus de tourner avec Kenny Rogers, Alan Jackson et Blake Shelton.

«Cette expérience m'a fait écrire différemment. C'est une machine à chansons là-bas. Moi, j'écris un bout de chanson et quand ça ne sort plus, je peux la finir deux mois plus tard.»

À Nashville, «il faut avoir fini avant 17 h», résume Yoan. «C'est difficile. C'est bien, car ça te pousse, même si je trouve que ça manque de naturel [...]. Raconter est plus facile que d'inventer.»

En studio

Yoan a confié les arrangements de Depuis longtemps à son proche collaborateur Rick Haworth (Michel Rivard, Daniel Bélanger). Et il s'est adjoint un coréalisateur, Rob Heaney (Patrick Watson, The Franklin Electric). «Je ne cherchais pas un réalisateur, mais un coréalisateur qui m'aiderait à concrétiser mes idées. Je suis arrivé avec les démos en studio, raconte Yoan. Rob n'a pas un gros ego. Il a respecté qui je suis.»

Ses nouvelles chansons parlent bien entendu des aléas du coeur. «L'amour est souvent un bon sujet!», dit Yoan en riant.

L'amour au temps de la popularité? «Je suis plus réaliste et plus vigilant», dit Yoan, qui demeure néanmoins «rêveur, romantique et attentionné».

L'auteur-compositeur-interprète de 22 ans propose plusieurs ballades, dont Annecy. «L'un des textes les plus profonds, je dirais.»

Yoan a également hâte d'interpréter de nouvelles compositions plus rock, dont Karma. «C'est inspiré d'un ami à moi qui a eu un accident. Il a frôlé la mort et a même été ramené à la vie... Je suis allé le voir à l'hôpital et je me suis mis dans sa peau.»

Sinon, on retrouve sur l'album la chanson écrite par son père qu'il a interprétée à La voixJe t'aime évidemment, et une reprise inattendue de Michel Pagliaro, Sous peine d'amour. «Je suis un grand fan de Michel, précise Yoan. J'aurais pu l'écrire, cette chanson-là. Les mots, les sentiments... Je me reconnais là-dedans. Quand je l'ai appelé, il était surpris que je choisisse celle-là.»

Or, Yoan fait les choses «comme [il] les ressen[t]».

Il a par ailleurs gardé un lien avec Isabelle Boulay, son ancienne coach de La voix. Il lui demande encore conseil et elle est là quand il en a besoin.

Malgré le succès, sa vie n'a pas tant changé. «J'ai tenu à ce qu'elle ne change pas», précise-t-il.

Yoan lance son deuxième album, Depuis longtemps, ce soir à Montréal, avec un spectacle au National.

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COUNTRY-FOLK. Depuis longtemps. Yoan. Select.