Jamar Rolando McNaughton, alias Chronixx, s'impose sans contredit parmi les chanteurs du renouveau jamaïcain.

On a visionné sur YouTube ses clips pur jus caribéen. On a siroté en 2016 son excellent mixtape Roots & Chalice - avec Federation Sound. On l'a vu chez Jimmy Fallon en février dernier. On vient à peine de noter sa participation probante au nouvel opus de Joey Bada$$. On attend la sortie prochaine de l'album Chronology sous étiquette Soul Circle Music.

Bref, les attentes au sujet de ce chanteur charismatique ne cessent de gagner en altitude, et ce, depuis la fin de son adolescence. Cela pourrait continuer de grimper ce soir, c'est-à-dire à l'occasion de l'escale montréalaise de Chronixx à l'Olympia.

«Ce sera ma première fois chez vous, je crois. Je me produis toujours avec un groupe de musiciens jamaïcains, la musique de mon pays est une musique vivante, jouée par des instrumentistes ou producteurs très créatifs», annonce-t-il d'une voix posée. D'un calme... stupéfiant comme on pourrait l'imaginer après avoir absorbé certains clips enfumés de son cru? Nenni. Cohérent, vif d'esprit, le mec de 24 ans affiche présent au bout du fil.

«Je serai précédé de Kelissa, qui fait aussi partie de cette génération d'artistes émergents. Au cours des derniers mois, il faut dire, nous étions plusieurs artistes jamaïcains à faire partie d'un même plateau de tournée», poursuit-il avant d'évoquer ses racines.

Fils d'un chanteur dancehall (Chronicle, d'où le pseudo parental), Chronixx a grandi à Spanish Town, cité coloniale plantée à l'intérieur des terres rastafariennes. «C'est encore chez moi, mais je passe le plus clair de mon temps sur la route», indique notre interviewé.

Biberonné à la musique paternelle depuis la petite enfance, Chronixx n'a que faire de ce «reggae revival» auquel il est associé. Pour lui, sa carrière internationale n'est que le prolongement naturel d'une éducation authentique et sincère.

«Les étiquettes m'importent peu et... je comprends tout de même le besoin des gens d'en faire usage pour mieux naviguer à travers les styles musicaux. En tant qu'esprit libre, je ne m'y fie pas pour autant. Cela ne guide pas mon parcours.»

«Bien sûr, je m'intéresse à ce qui intéresse ma génération en tant que Jamaïcain: reggae, dub, ska, rocksteady, dancehall, sans compter les extrapolations soca, calypso, reggaeton, reggae électronique [drum'n'bass, dubstep, etc.], reggae brésilien, hip-hop ou R&B.»

Cela étant formulé, Chronixx ne tient pas à préciser davantage sa trajectoire esthétique, mais n'hésite pas à exprimer ses aspirations. «Je fais partie d'une mouvance plus vaste que cette tendance microscopique à laquelle certains voudraient bien m'associer. Je me considère comme un Africain avec des spécificités caribéennes et... au bout du compte, je suis un être humain comme vous.

«Mon histoire et mon destin ne se trouvent pas dans les livres d'école, encore moins dans les livres religieux.»

Culture insulaire et mondialisée

Chanteur, auteur, compositeur, réalisateur, leader d'ensemble, libre penseur, il dit pouvoir compter sur une solide culture insulaire dont il est visiblement très fier, mais affirme aussi s'inscrire dans une culture mondialisée.

«Comme tous les jeunes de ma génération dans le monde entier, je suis un enfant de l'internet. J'ai pu accéder à tous les contenus, je ne me limite pas à mon environnement musical immédiat. Ainsi, en collaborant avec des artistes hip-hop comme Joey Bada$$, je m'applique de facto à faire évoluer la culture dont je suis issu.»

L'identité n'en demeure pas moins forte, proéminente. «Je suis un musicien jamaïcain aux origines africaines. J'ai le sentiment et le devoir de porter ma culture, car j'estime cette culture riche et puissante.

«C'est ma priorité dans ce long voyage musical que j'ai entrepris. Je travaille à répandre des musiques propices aux changements positifs. Je crois en la musique comme agent de changement et révélateur de l'identité. Faire partie de cette relance de la culture jamaïcaine n'est certes pas une stratégie de marketing.»

Après avoir discouru contre toutes étiquettes, Chronixx en assume le paradoxe, acceptant d'être associé à quelque revivalisme reggae... «À condition que cela renvoie au sens de la famille et à la tâche de préserver ma culture. Mais il ne faut pas en rester là, il y a encore beaucoup à faire. Enfin... je ne veux pas parler pour les autres, j'ambitionne personnellement d'accomplir un vaste travail.»

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Chronixx, ce soir à 20 h, à l'Olympia de Montréal, précédé de Kelissa.