Sampha Sisay a travaillé comme réalisateur auprès de SBTRKT, FKA Twigs et Jessie Ware avant d'être mis à contribution par des superstars américaines comme Drake, Kanye West et Solange Knowles... En tant qu'artiste solo, il récolte maintenant les dithyrambes avec son premier album, Process, et fait salle comble dans toutes les grandes villes d'Europe ou d'Amérique.

Le Britannique d'origine africaine (ses parents sont de Sierra Leone), qui remplira le Théâtre Corona ce soir, a tout pour bomber le torse, adopter le ton triomphaliste de la star électro-soul qu'il est en train de devenir.

Or, au bout du fil, sa voix douce et cendrée est étonnamment timorée.

«J'imagine que le bouche à oreille a fait son oeuvre, estime-t-il, hésitant. Mon travail a plu, les commandes se sont multipliées. Entre-temps, j'ai chanté mon matériel en première partie de quelques artistes. Par exemple, j'ai tourné avec SBTRKT [notamment à Osheaga], ce qui m'avait permis de découvrir la puissance de l'émotion sur scène.»

Réalisateur par défaut

Enfant et préadolescent, Sampha a appris les rudiments du piano, ce qui l'a sûrement aidé à se définir d'abord en tant que réalisateur, quoique...

«Certaines personnes s'appuient sur leur connaissance du clavier. Personnellement, je me suis mis à faire des chansons parce que je ne le connaissais pas suffisamment!», glousse-t-il.

Chaque production a néanmoins permis à Sampha de grandir, de gagner en assurance, d'apprendre ce métier où il excelle: «J'utilise des synthétiseurs analogiques, des logiciels, beaucoup d'électronique. J'ai aussi traversé une phase où je jouais des instruments acoustiques, guitare ou piano, pour faire plus "naturel". J'ai ensuite réalisé que l'émotion importait davantage que la nature de l'instrumentation.»

Trouver sa voix

Au départ, Sampha se voyait essentiellement comme un réalisateur dont la voix n'était qu'un des outils.

«Je passais des heures interminables devant mon ordinateur et mes instruments. J'avais l'attitude et le comportement d'un réalisateur, et ne mettais pas l'accent sur mon propre chant. Je ne me voyais pas vraiment artiste solo... et puis, je me suis surpris à beaucoup aimer chanter seul au piano. Cet état d'esprit a fait son chemin, je me suis intéressé davantage aux interprètes avec qui je collaborais, à leur façon de faire. J'ai appris.»

Sa chanson Subconscious, croit-il, a été le véritable déclencheur.

«Je n'avais qu'un mince répertoire original à l'époque, mais il s'est passé quelque chose lorsque j'ai créé cette chanson. Plusieurs m'ont alors encouragé à poursuivre. Ce ne fut pas simple, remarquez: j'ai dû batailler pour en venir à de bons résultats, faire en sorte que ma musique prenne son envol.»

«Ce n'était pas facile pour moi de chanter, mais j'aimais le faire et je remercie tous ceux et celles qui m'y ont poussé.»

Quant au style de Sampha, le principal intéressé en décrit les sources et les fondements: «Dans ma famille, nous avons écouté beaucoup de soul/R & B. Mes parents faisaient aussi jouer de la musique africaine à la maison. Enfant et préadolescent, j'aimais particulièrement Stevie Wonder, puis j'ai écouté toutes sortes d'artistes: 4hero, D'Angelo, Daft Punk... Je passais du R & B au big beat en passant par le hip-hop et l'électro. Aujourd'hui? Eh bien, c'est un mélange; c'est le goût d'un Britannique d'origine africaine!»

Sur scène, il se présente avec un groupe de quatre musiciens l'incluant.

«Nous essayons de transcrire le mieux possible la matière de mes enregistrements, de manière à fournir une vraie performance en temps réel. Ma musique peut traverser plusieurs variations d'intensité mais révèle aussi ma personnalité réservée. Cela dit, je deviens de plus en plus solide sur scène.»

Méfiez-vous des eaux calmes...

Au Théâtre Corona ce soir, 21h. Avec Mal Devisa, Michele Nox.

Quelques collaborations de Sampha

Hold On, SBTRKT, Album: SBTRKT (2011)

Too Much, Drake, Album: Nothing Was the Same (2013)

Saint Pablo, Kanye West, Album: The Life of Pablo (2016)

Don't Touch My Hair, Solange, Album: A Seat at the Table (2016)

Image fournie par la maison de disques

SBTRKT (2011)