Niyaz, groupe visionnaire de la world 2.0, d'inspiration orientale et transculturelle, présente à Mundial Montréal son nouveau spectacle traversé par le soufisme de la mystique et poétesse Rabi'a al-Adawiya, plus communément nommée Rabia Al Basri.

Voilà donc que ce groupe excellent emprunte la piste soufi... lectro!

Tous deux d'origine iranienne, Azam Ali et Loga Ramin Torkian ont fondé Niyaz en 2005. Entre leurs projets solos, quatre albums ont été réalisés depuis. Le couple s'était uni en Californie, avait fondé ce groupe et une petite famille pour ensuite s'installer à Montréal, il y a sept ans. Toute bonne chose a une fin, semble-t-il, puisque Niyaz a de nouveau choisi Los Angeles pour port d'attache.

«Nos réseaux professionnels et surtout notre travail pour l'industrie du cinéma nous a ramenés là-bas. La composition de bandes originales pour le cinéma ou la télé n'a jamais cessé. Il valait mieux vivre à proximité de nos employeurs», indique Loga Ramin Torkian, multi-instrumentiste et compositeur.

D'origine iranienne, Loga Ramin Torkian avait migré aux États-Unis lorsqu'il était adolescent. D'abord installé en Oregon, il a vécu à Los Angeles, puis à Montréal avant de rentrer en Californie il y a à peine trois mois. Quant à Azam Ali, elle avait quitté l'Iran toute petite avec sa mère pour s'établir dans le Maharashtra en Inde, avant de poursuivre la migration jusqu'en Californie et ensuite au Québec.

Un spectacle de rêve

«Nous conservons la même formation telle qu'elle était à Montréal avant notre retour aux États-Unis, tient à souligner L.R. Torkian. Notre travail actuel est une expansion de tous nos albums et spectacles antérieurs. Aujourd'hui, nous nous retrouvons cinq sur scène: Azam Ali, chant, Didem Basar, kanoun, Gabriel Éthier, claviers et programmation, Bertil Schulrabe, percussions et moi-même au saz et au kamaan.»

Niyaz, avons-nous noté dès son apparition dans le paysage de la world 2.0, soit une décennie plus tôt, s'avérait une formation visionnaire dans son projet d'amalgamer les lutheries traditionnelles orientales, électriques et aussi électroniques.

«Tout doit se marier avec le groove et la voix humaine, résume Loga Ramin Torkian. La prédominance du jeu instrumental ou de l'électronique varie d'une pièce à l'autre, la nature de chaque pièce en détermine l'instrumentation et la dynamique. Assurément, en tout cas, nous n'offrons pas un DJ set; au sein de Niyaz, l'approche électro est considérée comme un moyen et non une finalité.»

«Le nouveau spectacle du groupe est un rêve qui se réalise», lance à son tour Azam Ali, visiblement ravie du produit offert par sa formation. «Nous avons pu obtenir beaucoup d'aide pour notre projet, se réjouit-elle, ça aurait été très cher, voire impossible à concevoir ailleurs qu'au Québec.»

Un des objectifs du nouveau spectacle de Niyaz était l'intégration de la danse et d'une dimension visuelle à la hauteur des plus importantes avancées technologiques au domaine de l'éclairage, de la scénographie et du multimédia.

«Nous avions assisté à plusieurs représentations dans les mondes de la danse et du théâtre d'avant-garde, et avions réalisé que personne n'en faisait autant dans un contexte musical, du moins à notre échelle. Nous avons alors contacté le concepteur visuel Jérôme Delapierre, qui n'avait jamais travaillé jusque-là à la conception visuelle d'un spectacle axé essentiellement sur la musique.»

De part et d'autre, ce fut une formidable découverte, soutient la chanteuse.

«Nous croyons qu'il s'agit d'un grand pas en avant pour Niyaz, non seulement pour sa dimension visuelle mais aussi pour l'inclusion de la danse. Avec nous, donc, se produit Tanya Evanson, soit l'une des rares danseuses derviche. Elle avait déjà tourné avec Niyaz mais son rôle est magnifié dans ce nouveau spectacle.»

Prolongement de l'album The Fourth Light, le nouveau spectacle de Niyaz présente des chansons originales interprétées en langues perse, turque, bakkhtiarie, kurde, afghane, etc. Les chansons s'inspirent des écrits de Rabi'a al-Adawiya ou Rabia Al Basri (717-801), esclave affranchie qui devint la première poétesse et une figure incontournable de la spiritualité soufie.

Cette grande mystique se consacra entièrement à sa quête spirituelle et trancha avec la vision dominante de son époque. Ainsi, elle opposait sa dévotion à Allah et la valeur absolue de l'amour à la peur de l'enfer. Pour elle, il ne fallait pas souscrire aux lois divines, mais plutôt pour la valeur intrinsèque de l'amour de Dieu et de son prochain.

«Nous avons voulu la mettre en lumière, explique Azam Ali. Nous nous intéressons aux grands mystiques dont la pensée universelle transcende la religion à laquelle ils étaient associés. C'est pourquoi Rabia est le centre symbolique de notre spectacle, la toile de fond.»

Pour la chanteuse de Niyaz, cette thématique est aussi une affirmation féministe à l'orientale.

«En tant que femme d'origine iranienne, Rabia est un exemple à suivre, bien que je ne sois pas religieuse. Je ne suis ni soufie ni musulmane, je suis plutôt ouverte à toutes les religions et philosophies. Je m'intéresse à toutes les quêtes de vérité, tout ce qui permet d'apprendre et élever ma conscience.»

Voilà où peut mener la piste soufilectro...

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Dans le cadre de Mundial Montréal, The Fourth Light Project est présenté ce soir 20 h, au Théâtre Outremont.