Il a remporté le premier Grammy de la meilleure performance rap de l'histoire avec son pote Will Smith. Si les faits saillants de la biographie de Jazzy Jeff datent du passé, le musicien est plus actif que jamais comme DJ et comme animateur de la websérie Vinyl Destination. Entrevue avec le rappeur de 51 ans qui a signé récemment le «scratch» de la bande originale du film Straight Outta Compton à la demande de Dr. Dre. Will Smith veut aussi repartir en tournée avec lui...

Parlez-nous de votre série Vinyl Destination. Vous êtes comme l'Anthony Bourdain de la musique?

J'essaie! Je fais quelque 150 dates par année. Je voyage beaucoup et, quand je revenais à la maison, mes proches ne comprenaient pas vraiment tout ce que je voyais. J'ai donc eu l'idée d'avoir un vidéaste qui filme tout ce que je vois. En Asie, ce vidéaste a eu l'idée de faire une série qui documenterait mes voyages. Ça a débuté il y a quatre ans et ça se poursuit.

En quoi la culture du DJ en Asie et en Europe est-elle plus forte et différente de celle en Amérique du Nord?

La culture explose en ce moment, à tel point qu'il y a des DJ en demande partout et dans tous les événements dans des lieux insoupçonnés. Le marché a grandi, la demande aussi, que ce soit en Indonésie, en Suisse ou en Afrique du Sud. C'est super de pouvoir documenter le tout en vidéo. Les bonnes comme les mauvaises choses. Les bons comme les mauvais moments.

Aujourd'hui, la technologie permet à tout le monde de devenir DJ. Qu'est-ce qui distingue les meilleurs?

C'est comme le hockey. Tout le monde peut acheter des patins, un bâton et une rondelle. Mais il y a des professionnels et des amateurs. Il faut du temps, de la pratique et de la détermination pour atteindre la ligue des pros.

En quoi être DJ est-il complémentaire au fait de sortir des albums solos comme auteur-compositeur?

Quand je suis sur la route, je veux être en studio. Et quand je suis en studio, je veux être sur la route. C'est un beau problème.

En 1989, vous avez remporté le tout premier prix Grammy de l'histoire pour la meilleure performance rap. Aujourd'hui, pensez-vous que le rap est mieux compris?

Je pense que oui. En 1989, des gens pensaient que le rap allait mourir. Aujourd'hui, il est étudié. Les gens comprennent les origines du hip-hop, notamment grâce à la série de Netflix The Get Down avec Grandmaster Flash qui s'est assuré de l'authenticité du scénario.

C'est vrai que vous avez boycotté la cérémonie des Grammy en 1989?

Oui, car la remise du prix de la nouvelle catégorie rap n'était pas télévisée. Nous voulions défendre la légitimité du rap.

À l'image de The Get Down, Straight Outta Compton a aussi joué un rôle éducatif par rapport au rap. Comment l'offre de faire le scratch pour la bande originale du film est-elle venue à vous?

J'ai reçu un appel de Dr. Dre. Je pensais que c'était une blague ! Des gens me disaient qu'il voulait me parler. Je le connais depuis longtemps. Nous avons discuté et il m'a dit qu'il voulait que le film soit le plus authentique possible. Il cherchait quelqu'un qui était actif à l'époque du film.

Restons dans le passé. Comment avez-vous connu Will Smith, avec qui vous avez formé le tandem DJ Jazzy Jeff and The Fresh Prince?

Vous savez quoi? C'est simple. Il était dans un groupe (crew) de Philadelphie. Nous nous sommes croisés dans un party. J'étais sur scène, il a pris le micro et c'était naturel. Le lendemain, nous avons fait une séance ensemble et voilà.

Il y a aussi eu l'émission The Fresh Prince of Bel-Air. Un succès impossible à prévoir. Comment s'explique-t-il?

Les plus jeunes générations m'en parlent toujours. On me reconnaît partout dans le monde à cause de l'émission. Personne n'aurait pu prévoir un tel succès. Le personnage de Will était un bon adolescent, mais il se mettait dans le pétrin...

Il paraît que Will Smith veut repartir en tournée avec vous...

Oui, tout est une question d'horaire. Will est l'une des plus grandes stars du cinéma du monde. Je lui dis toujours: «Je suis déjà en tournée. Je t'attends!»

Vous avez participé récemment, avec Lady Gaga et Lenny Kravitz, à un spectacle dans le cadre de la convention démocrate. Désirez-vous vous impliquer davantage en politique?

Je garde habituellement mes opinions pour moi-même. Je n'aime pas le paysage politique, le fait de devoir choisir un camp ou l'autre. Mais je veux que le monde soit meilleur...

Vous venez souvent à Montréal?

J'y étais pour la semaine du Grand Prix. Je tente d'y venir le plus souvent possible. Ce n'est pas si loin de Philadelphie. J'adore Montréal. Je me suis produit beaucoup au [défunt] Club Sona.

_________________________________________________________________________________

Jazzy Jeff se produit gratuitement demain, à 22 h, sur la scène principale extérieure du festival Oumf. Avant lui: le rappeur Husser, le groupe Brown et Skratch Bastid.