On croyait que ce ne serait qu'une mode, mais on s'était trompés. Plus de 15 ans après la découverte de la fabuleuse série CD des Éthiopiques, la musique pop éthiopienne continue de fasciner les oreilles occidentales, faisant même des petits.

En Europe, une vingtaine de groupes se spécialisent dans ce créneau très particulier des musiques du monde. Aux États-Unis, il y en a beaucoup moins. Mais, fait intéressant, deux des formations les plus importantes de ce mouvement «revivaliste» sont originaires de Boston. La ville n'est pourtant pas réputée pour la taille de sa communauté éthiopienne (environ 10 000 personnes, des «pinottes», à côté de Washington, qui en compte 230 000).

Ce fut d'abord l'Either/Orchestra, avec son grand ensemble à saveur très jazz. Puis, plus récemment, le Debo Band, avec son style plus rock, plus funky. Le groupe, qui s'est fait connaître en 2012 avec un premier album paru sous étiquette Sub Pop, sera en concert la semaine prochaine à Montréal.

Fondé par Danny Mekonnen, Éthiopien d'origine élevé aux États-Unis, le Debo Band se veut un hybride entre la musique éthiopienne et le rock à l'américaine.

On y retrouve les cuivres et le groove de l'éthio-jazz, de même qu'un authentique chanteur éthiopien, mais aussi des guitares wah-wah, des riffs carrés, du violon électrique trafiqué et une batterie funky qui martèle le rythme comme un troupeau d'éléphants qui s'emballe.

Danny Mekonnen ne cache pas sa satisfaction d'avoir su conjuguer la quête de ses racines éthiopiennes et sa culture nord-américaine.

«Le dialogue entre musique éthiopienne et musique américaine existe depuis longtemps, reconnaît le saxophoniste, joint à Boston. Mais je crois que notre musique est une extension de ce dialogue. Pour moi, c'était très important d'élargir le truc. Je ne voulais pas rester collé sur le son éthiopien classique.»

«Je ne voulais pas simplement recréer. J'étais plus désireux d'inventer une troisième voie où on pourrait aussi exprimer notre américanité.»

Lors de son dernier passage aux Nuits d'Afrique en 2014, le Debo Band comptait une douzaine de membres (Debo signifie «effort collectif» en éthiopien antique). Pour son concert montréalais samedi prochain à La Vitrola, le groupe sera en formation réduite de «seulement» huit personnes.

Cette prestation sera l'occasion d'entendre des morceaux du prochain album, qui est déjà enregistré, mais dont la sortie n'est prévue qu'au printemps, afin de coïncider avec la saison des festivals.

Élargir sa palette musicale

Ce deuxième opus sera révélateur, estime Danny Mekonnen, car il permettra au groupe de montrer toute l'étendue de sa palette musicale.

Outre un son plus rock, on pourra y entendre une pièce de Duke Ellington, une version en amharique (la langue majoritaire de l'Éthiopie) d'une chanson somalienne et même un morceau d'origine japonaise, le tout dans un environnement résolument groovy et éthiopien, une mixture unique qui n'est pas sans plaire au leader de la formation.

«Quand nous avons tourné en Éthiopie, en 2009, un musicien éthiopien que j'admire beaucoup m'a dit: "Votre musique sonne authentique, mais tu as ajouté quelque chose." Pour moi, c'était un compliment. Parce qu'il nous disait qu'on avait trouvé notre propre voix.

«L'idée, je crois, est de rester soi-même... Les différents éléments vont ensuite se mettre en place.»

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À La Vitrola (4602, boulevard Saint-Laurent) le 24 octobre, 20 h 30.