Après des mois à susciter l'enthousiasme en coulisses, Safia Nolin a eu un avant-goût de la reconnaissance qui l'attend le week-end dernier lors du spectacle qu'elle donnait au Festival de musique émergente, avant Seoul et Louis-Jean Cormier.

Sa voix pure chargée d'émotion a naturellement imposé le silence complet dans la salle où elle se produisait, aménagée dans une ancienne église.

Rencontrée pour la première fois en mars dernier, Safia n'est pas une jeune femme comme les autres. Cela tient à son physique, à son langage d'ado, à son look, mais surtout à sa façon de mettre en musique ses tourments et sa solitude.

« Le mot qui revient le plus est mélancolie, lance-t-elle. Cela ne m'étonne pas pantoute. C'est vrai. C'est triste. »

Grandir à Limoilou

Son premier album, Limoilou, sorti hier, raconte l'égarement et la solitude qu'a vécus la jeune femme en grandissant à Québec. La guitare et la musique l'ont sauvée après qu'elle a abandonné ses études à l'âge de 15 ans.

Petit à petit, Safia s'est mise à mettre des reprises en ligne sur YouTube. Puis sa mère - son père est absent de sa vie depuis de nombreuses années - l'a pratiquement obligée à s'inscrire à l'École de la chanson de Granby, où le réalisateur Philippe Brault l'a remarquée.

Ses chansons sont des tirs à l'arc au coeur. « Noël sur la lune, peut-être sur Saturne. Noël, partout, sauf chez nous », chante-t-elle.

Limoilou, c'était son ancienne vie et son adolescence difficile. Aujourd'hui, il faut voir Safia Nolin multiplier les accolades dans un festival comme le FME. Tout le monde l'aime. « Les gens sont tellement fins avec moi. Je ne comprends pas », lance-t-elle.

Comment l'auteure-compositrice-interprète vit-elle avec ce grand contraste ? Très bien.

« J'étais fucking perdue sans cash et là, je sais où je m'en vais. J'ai une identité. Les gens me complimentent sur quelque chose qui me fait buzzer. » - Safia Nolin

À 23 ans, Safia Nolin est fière que la musique devienne un métier pour elle. Alors qu'elle est venue au FME « pour triper » l'an dernier, elle n'a pas bu une goutte d'alcool cette fois-ci pour garder la forme. « C'est cool de dire à quelqu'un : "Excuse, je dois aller me coucher tôt. J'ai une entrevue et un show important demain." C'est positif. »

« Mais mes nouvelles tounes seront encore dark, ajoute-t-elle. J'ai des problèmes de confiance en moi, je suis insécure en amitié... Mais pour l'instant, je ne suis pas capable d'écrire. Il paraît que c'est normal. Quoique j'ai écrit une toune et que c'est tellement down que ma mère est descendue à Montréal. »

Harry Potter et les épaulards

Depuis le début de sa jeune carrière, Safia Nolin a noué des liens avec plusieurs mentors masculins qui ont vu en elle un diamant brut. Son imprésario Gourmet Délice, son réalisateur Philippe Brault et Joseph Marchand (Forêt), qui l'accompagne sur scène à la guitare. « Je sais. C'est fucked up. Même au niveau personnel, j'ai beaucoup d'amis gars. »

Adolescente, Safia Nolin a carburé « aux bands qui me pognent dans les émotions ». Nirvana et les deux premiers albums de Coldplay, puis Bon Iver et Karkwa (« cela se pouvait en français »).

Pour son premier album à elle, la chanteuse folk avait envie d'intimité et d'épuration. À peine des percussions et un peu de piano sur la pièce d'ouverture, Les excuses. « J'ai commencé toute seule et j'aime quand c'est le plus simple et le plus petit possible. En même temps, il y a des bands burnés comme Tame Impala et Arcade Fire que j'adore. Comme Karkwa. Ce n'est pas petit pantoute, c'est gros », dit-elle.

Sinon, Safia Nolin aime Harry Potter et son animal préféré est l'épaulard. Mais le week-end dernier, elle n'arrivait pas à se concentrer sur quoi que ce soit. « Il n'y a pas de place dans mon cerveau. Il faut que mon album sorte. C'est fou en crisse. J'ai l'impression que ça fait des mois, mais non. J'ai tellement hâte. Il sort fucking vendredi. »

C'était avant-hier.

CHANSON FOLK

Limoilou

Safia Nolin

Bonsound

IMAGE FOURNIE PAR BONSOUND

Limoilou, de Safia Nolin