Pour sortir du cul-de-sac créatif dans lequel il se sentait coincé, Dumas s'est entouré de nouveaux collaborateurs à la musique et aux textes. Stimulé par ces jeunes complices, le musicien de 35 ans a finalement accepté de lâcher prise pour voir jusqu'où cette nouvelle aventure pouvait le mener.

À 35 ans, Dumas n'en est pas à son premier virage. On se souvient de son expérience de laboratoire en studio qui l'avait vu accoucher de cinq albums en un an, en 2008-2009.

Cette fois, la transformation est plus radicale. Encouragé en cela par le guitariste Jocelyn Tellier, avec qui il jouait depuis une dizaine d'années, Dumas a décidé «d'essayer autre chose». Son album précédent, L'heure et l'endroit, lui avait donné l'impression de tourner en rond et c'est un jeune homme un peu mêlé qu'on avait vu sur la scène du Métropolis en novembre 2012.

«Je trouvais que j'étais allé un peu au bout de la formule plus rock, j'étais tanné de ça, avoue Dumas qui nous reçoit dans le studio de son ami Louis Legault, à Saint-Henri. Je me posais des questions. Un peu par hasard, je me suis mis à travailler avec Jonathan Dauphinais et on a eu besoin d'un drummer-claviériste, Étienne Dupuis-Cloutier. C'est drôle parce que ce sont des connaissances avec qui je joue au hockey.»

L'élan retrouvé

Ces deux jeunes musiciens qui donnent des couleurs électro-pop aux nouvelles chansons de Dumas ne connaissaient pas son répertoire par coeur. Ils l'ont surtout encouragé à renouer avec l'élan spontané d'il y a une dizaine d'années quand il a enregistré Le cours des jours, un album que Dupuis-Cloutier écoutait au cégep.

Ils ont donné quelques shows en trio dans de toutes petites boîtes, un exercice suffisamment concluant pour que Dumas confie la réalisation de son prochain album à ces deux jeunes loups.

«Honnêtement, ç'a été l'étape la plus difficile. La première chose qu'ils ont faite, ç'a été de me sortir du studio. Ils m'ont dit: «Reviens demain soir à 8 heures.» Quand j'ai entendu ce qu'ils avaient fait à partir de mes maquettes, j'ai été agréablement surpris, poursuit Dumas. C'est un pari que j'avais fait et ils sont allés au-delà de mes attentes. Ils ont fait ressortir des choses comme mon côté plus pop que je n'assumais plus depuis des années.»

Écrire à quatre mains

Autre changement majeur: Dumas s'est adjoint un collaborateur aux textes. Après avoir lu son roman Charlotte Before Christ, dans lequel il a reconnu plusieurs références à la musique pop anglaise, il a proposé à Alexandre Soublière de mettre des mots sur ses musiques, sans se douter que le jeune auteur faisait lui aussi partie d'un groupe de musique.

«Je n'étais pas inquiet pour la musique, mais pour les textes, ça aurait pu être délicat de travailler avec un romancier, dit Dumas. Il y avait un risque que le monde me perde un peu dans le propos et je trouvais important que quelqu'un qui écoute le CD me reconnaisse.»

Dumas n'était pas insensible à la critique qui lui a reproché les thèmes impressionnistes un peu éculés de ses textes. «Il y a aussi le fait que je ne suis pas le même gars qui sortait des arts et lettres à 23 ans et qui essayait d'écrire, ajoute-t-il. À 35 ans, j'étais prêt à passer à une autre étape. Alex fait de la pub, donc il n'a aucune limite de réécriture. Je l'ai tellement fait réécrire quand, par exemple, j'avais de la difficulté à me mettre un mot en bouche.»

«Le plus intéressant, c'est qu'Alex [Soublière] m'a ramené des thèmes que je n'osais plus aborder, comme l'amour dans la chanson État voyou, par exemple.»

Un coup de coeur

Il y a aussi que Dumas avait eu un coup de coeur pour l'album The Bravest Man in the Universe du regretté chanteur soul Bobby Womack, réalisé par Damon Albarn. Sur un coup de tête, il a écrit au management de l'artiste britannique pour voir si son acolyte Stephen Sedgwick accepterait de travailler avec lui. Sedgwick a écouté la chanson Vaudou et a proposé de mixer l'album en entier.

C'est Sedgwick, à qui Dumas n'avait pourtant donné aucune indication précise, qui a choisi de mettre sa voix au premier plan.

«On était vraiment contents parce qu'il n'avait aucune idée préconçue de qui je suis, de ce que je fais et, en plus, je chante en français. Les mix nous revenaient et la voix était vraiment assumée. En plus, j'ai reconnu l'épaisseur dans les basses fréquences que j'avais tant aimée dans l'album de Bobby Womack. Ça m'a donné confiance que cette musique-là ait un sens pour quelqu'un de complètement extérieur.»

Dès février prochain, Dumas va transposer sur scène la matière de son nouvel album avec Dupuis-Cloutier et un troisième musicien qui va remplacer Dauphinais. Quoi qu'il arrive, le chanteur et guitariste ressort énergisé de cette expérience.

«Ces collaborations ont eu un effet libérateur sur moi par rapport à mes peurs et au travail avec d'autres musiciens. J'ai fait cet album avec Jonathan et Étienne, mais je ne me sens pas obligé de retravailler avec eux à un autre album. Tout est possible, y compris de ne pas faire d'album, mais seulement des singles.»

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