«Quand on se jette du building, on peut s'écraser sur le trottoir avant de remonter, mais on peut aussi s'envoler comme un oiseau...»

Arthur H aime le risque, se jeter du building pour acquérir cette confiance qui, seule, permettra au créateur d'éviter les recettes et de prendre des risques plus grands encore.

La Presse a rencontré le chanteur fin août, au Festival de musique émergente de Rouyn-Noranda, où il donnait le premier spectacle de sa tournée Soleil Dedans, du titre de son dernier CD, enregistré en partie à Montréal en janvier dernier, sous l'oeil des webcaméras du Centre PHI. Pour montrer l'aspect «travail de mine» que peut représenter la création en studio, avait-il alors expliqué à notre collègue Nathalie Petrowski.

La femme en lui

En 25 ans de visites semestrielles à Montréal, Arthur H a rencontré plein de monde et il sait qui fait quoi et quels noms résonnent... Pour le projet du Centre PHI, auquel était associé le Consulat général de France, il s'était assuré les services de François Lafontaine, le crack de Karkwa, à la coréalisation, et de Mishka Stein et Robbie Kuster, deux proches collaborateurs de Patrick Watson. Qui a enregistré une pièce avec Arthur H: pas un gros risque là...

«On a fait ça chez lui, une nuit. Il y avait très peu de lumière... Patrick a mis un micro dans le piano et on a fait une prise témoin. On a repris la chanson une ou deux fois ensuite, mais c'est la première version, la plus brute, qui se retrouve sur le disque.» Un disque où, comme Watson, Arthur H se lance dans les suraiguës: il laisse la femme en lui s'exprimer, dira-t-il.

Et il s'exprime devant la femme qui lui inspire ses chansons, toujours «atmosphériques», qu'elles soient rock, jazz ou électro. Ici La caissière du super, du supermarché, s'entend, premier single de Soleil dedans, qui sort aujourd'hui.

Quand on demande à Arthur H d'évaluer le résultat de la démarche, il répond qu'il a fait ce qu'il pouvait dans ces circonstances particulières, tout en gardant à l'esprit «la notion d'échec», toujours possible. Et, comme pour se garder une issue, le chanteur de 48 ans ajoute que «l'échec peut être aussi bénéfique que le succès»...

L'état de l'industrie

Sur l'état de l'industrie musicale en France, par ailleurs, il dira que «les grosses boîtes américaines comme Apple, Microsoft et Amazon dictent leur loi», une loi vide de toute générosité. Et la musique? «Toute à disposition, en flux constant, la musique a beaucoup perdu de sa valeur. Bien sûr, nous nous sommes approprié le passé; présentement, nous sommes dans l'oeil du cyclone, en phase de digestion...»

Certains jeunes chanteurs français cherchent-ils conseil auprès d'Arthur H, créateur éclectique au cheminement original? La question, de toute évidence, l'indispose: «Je me sens d'aujourd'hui. Je ne suis pas un dinosaure. Je mets encore toute mon énergie à explorer la musique.» OK ...

Comment, finalement, Arthur H a-t-il vu évoluer la scène québécoise, lui qui, si notre mémoire est bonne, a chanté à Montréal pour la première fois en 1989, au Cégep Maisonneuve dans le cadre de Coup de coeur francophone? «Il me semble d'abord que les artistes québécois ont plus confiance en eux-mêmes. Et que, aujourd'hui, les collaborations entre francophones et anglophones sont considérées davantage comme une richesse que comme une agression...»

Arthur H reviendra au Québec cet hiver, dans cette tournée qu'il entreprend cet automne en France. On a déjà annoncé un spectacle au Club Soda, dans le cadre de la série Jazz à l'année. En janvier, un bon temps pour nous présenter ici Soleil dedans. Et se tirer du building dans le banc de neige...

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CHANSON. ARTHUR H. SOLEIL DEDANS. POLYDOR/UNIVERSAL.