Ce n'est un secret pour personne: les Québécois adorent chanter. Si bien que les vacances d'été n'ont pas empêché 42 choeurs et 1500 passionnés de répondre à l'invitation lancée en avril par Kent Nagano. Jeudi soir prochain, le 14 août, ces choristes venus du Québec entier chanteront Carmina Burana, de Carl Orff, à l'esplanade du Parc olympique avec l'OSM à l'occasion d'un concert gratuit qui promet d'être démesuré.

«Les Québécois sont très intéressés par le chant, dit Alain Lanctôt, directeur général de l'Alliance des chorales du Québec et chef de l'Ensemble vocal Opus 16. La popularité des émissions comme Star Académie ou La voix en témoigne. Quand les grands orchestres comme l'OSM ou l'Orchestre Métropolitain programment des concerts avec choeur, les salles sont pleines. On a de très bons chanteurs ici, que ce soit en populaire ou en classique, et nos écoles de musique continuent d'en former.»

L'Alliance des chorales du Québec compte 248 choeurs membres, soit 214 choeurs d'adultes et 34 choeurs de jeunes. L'organisme a répertorié 228 autres groupes de chant qui n'en sont pas membres. Au total, le Québec compte donc plus de 500 choeurs ou chorales regroupant en moyenne 40 personnes. Et l'engouement ne s'essouffle pas: leur nombre augmente un peu chaque année, selon Alain Lanctôt.

«Ce sont des chorales d'amateurs, des choeurs communautaires, dit-il. Pour eux, c'est un loisir. Ils l'ont choisi parce qu'ils aiment la musique et que c'est une activité sociale. Généralement, il y a au moins une répétition par semaine, et les chorales donnent un concert à Noël ou au printemps. Plusieurs s'y font des amis. Ça peut même être une activité de couple, l'occasion de faire une sortie à deux.»

«Magasiner» sa chorale

Il existe des choeurs pour tous les groupes d'âge et pour tous les goûts. Leur répertoire va du classique au populaire sous toutes ses formes. On retrouve des choeurs mixtes, des choeurs masculins, des choeurs féminins et même des choeurs «en mouvement» qui agrémentent leurs spectacles de petites chorégraphies maison. D'autres s'adressent à des communautés spécifiques, par exemple les choeurs gais ou les choeurs de communautés ethniques. Mais le nerf de la guerre pour attirer le choriste, c'est vraiment le répertoire.

«Autrefois, les gens restaient fidèles à la même chorale pendant plusieurs années, mais, de plus en plus, ils la magasinent en fonction du répertoire qui sera chanté dans l'année à venir. Le sentiment d'appartenance est moins fort qu'auparavant», dit Alain Lanctôt.

Une source de bonheur

Les choristes interrogés par La Presse sont unanimes: quel que soit le répertoire choisi, chanter en groupe est une grande source d'épanouissement personnel et d'énergie.

«Comme chef de choeur, je vois des gens arriver aux répétitions après leur journée de travail et me dire à quel point ils sont fatigués, dit Alain Lanctôt. Après deux heures de répétition, ils constatent que ça leur a fait du bien. Il y a un effet d'entraînement qui vient du groupe.»

Pas besoin de savoir lire la musique ni d'avoir une voix d'opéra pour faire partie d'un choeur.

«La plupart des choeurs fournissent des CD ou des fichiers MP3 qui permettent d'écouter sa partie pour l'apprendre. Contrairement à bien d'autres activités, c'est accessible à la majorité des gens. Si vous pouvez vous déplacer et que vous avez de la mémoire et une voix de base, vous pouvez faire partie d'une chorale.»

Pourquoi chanter?

Sarah Oumamass

> 25 ans, actuaire

> Dans un choeur depuis huit ans

> Chorale: les Chanteurs du Brouhaha

«J'aime partager un sentiment d'unicité avec un groupe de personnes qui ont une passion commune. C'est une aventure que l'on mène tous ensemble. J'ai déjà chanté avec l'OSM au Centre Bell pour le centenaire du Canadien et nous étions 1500. Ç'a été une expérience incroyable.»

Albanie Leduc

>31 ans, professeure de philosophie au cégep

>Dans un choeur depuis trois ans

>Chorale: les Chanteurs du Brouhaha

«Je pense que je chante mieux en groupe que quand je chante seule. Tous les concerts de notre chorale sont vraiment agréables. Il y a une fête après, on apporte du gâteau et nos familles sont invitées. En plus des pratiques, je répète beaucoup à la maison et je fais partie du conseil d'administration de la chorale.»

Dominique Morin

>35 ans, enseignant

>Dans un choeur depuis quelques mois

>Chorale: les Chanteurs du Brouhaha

«J'aime beaucoup l'énergie que l'on ressent quand on chante avec nos pairs et j'aime la musique. Je voulais aussi une activité sociale. La chorale comble tous ces besoins en même temps. Mon arrivée est très récente: c'est en apprenant que l'on pourrait chanter Carmina Burana que j'ai décidé de m'y joindre.»

Capitaine André Gervais

>52 ans, militaire

>Dans un choeur depuis 10 ans

>Chorale: le Choeur philharmonique du Nouveau Monde

«Travailler sa voix, c'est travailler sur soi-même. Le fait d'apprendre à chanter en groupe procure un environnement tellement positif que c'est le plus beau passe-temps qui soit. J'ai commencé dans une chorale d'église et, plus tard, j'ai découvert que les partitions de classique étaient plus intéressantes pour les voix de basse comme la mienne.»

Reirha Khalfoun

>76 ans, retraitée

>Dans un choeur depuis 25 ans

>Chorale: le Choeur philharmonique du Nouveau Monde

«La musique, c'est ma vie. Je dis à qui veut l'entendre que j'ai raté ma vocation. J'aurais voulu être instrumentiste ou chanteuse d'opéra. Le chant est une façon de se rassembler et d'exprimer quelque chose de commun en étant transporté ailleurs que dans la vie de tous les jours, et ça donne beaucoup d'énergie. Chanter, c'est très important pour un être humain.»