Pascale Picard s'est dotée d'une nouvelle équipe - Simone Records -, d'un nouveau réalisateur - Stéphane Rancourt - et même d'une nouvelle coupe de cheveux - pixie.

Malgré les apparences, l'auteure-compositrice a eu envie de renverser l'adage et de faire du vieux avec du neuf. Sur All Things Pass, elle s'est offert la sobriété, un retour au folk rock dépouillé et instinctif de son premier album, Me, Myself & Us, qui a fait sonner la caisse enregistreuse plus de 300 000 fois en 2007.

«J'ai essayé le plus possible d'écouter mon instinct et mes intuitions, explique Pascale Picard, jointe au téléphone à Québec, où elle habite. Ce que je vais dire est un peu quétaine, mais le but était qu'il y ait le moins de bruit possible entre mon coeur et mes chansons.»

Avec du recul, elle observe que son deuxième album, A Letter to No One, a peut-être pâti de l'ingérence de tout un chacun. Particulièrement de l'équipe hexagonale du major Universal France, qui semblait vouloir à tout prix faire renaître des hits dans la veine de Gate 22. Mais au lieu du succès promis, c'est le danger du succédané qui guettait. «C'était inconscient, mais je réalise que je voulais que tout soit parfait dans les détails, et j'ai peut-être laissé trop de gens intervenir dans ma démarche.»

L'album est finalement paru discrètement au Québec sur étiquette Tandem, et n'a jamais traversé l'Atlantique, où un public l'attendait pourtant.

Cette fois, Pascale Picard a jeté la recette au feu, au risque de mettre sa popularité sur la glace, en quête d'«émotion» plus que de «perfection». Redoute-t-elle les réactions? Elle a plutôt hâte «d'enlever le plaster» après deux ans de travail. «C'est sûr qu'on fait toujours un album pour plaire, mais on devient plus imperméable à la critique, ce qui permet de faire les choses à sa manière», dit-elle.

En confiance

La musicienne dit apprendre d'erreur en erreur et d'album en album. La bande sonore de Trauma 3, qui lui a été confiée en 2011, l'a contrainte à privilégier des arrangements minimalistes - une tendance qui se prolonge sur All Things Pass, avec des pièces d'abord guidées par des mélodies guitare-voix.

Mais Pascale Picard s'est aussi «fait confiance pour explorer de nouveaux instruments»: elle signe les synthétiseurs sur le premier extrait radio, l'entraînante Runaway, alors qu'elle tapote le piano et gratte la basse à maintes reprises.

Cette liberté retrouvée repose d'abord sur une équipe constituée de «chums». Stéphane Rancourt, premier batteur du Pascale Picard Band, a pris les rênes de la réalisation, tandis que son copain, maintenant à la batterie, et le bassiste Philippe Morissette se sont chargés des arrangements.

Le choix de l'étiquette Simone Record (Louis-Jean Cormier, Dany Placard) s'est aussi fait par affinités. «On connaissait bien l'équipe, dit Pascale Picard. Sandy Boutin, qui gère la maison de disques, s'occupe de la gérance depuis 2010, alors on était en terrain connu.»

L'enregistrement du disque devait se faire en Californie, mais les comparses, encore là, ont préféré la simplicité et le confort de leur studio, à Québec. Ils se sont néanmoins payé 10 jours de soleil à Los Angeles pour assister à l'étape du mixage, laissée aux soins du réputé Sheldon Gomberg (Ben Harper, Ron Sexmith, Joseph Arthur).

«Un ami commun nous a présentés, et ça faisait un an que nous étions en contact en vue de l'enregistrement, raconte Pascale Picard. Les plans ont changé, mais son nom nous est réapparu pour le mixage. Il a vite compris ma personnalité et a apporté un petit côté West Coast, une chaleur particulière à l'album.»

La chanteuse compte bien sûr redistribuer un peu de cette chaleur en concert, probablement lorsque le froid reprendra ses droits l'automne prochain. Les salles et les disquaires français renoueront eux aussi avec la musique de Pascale Picard, après l'imbroglio entourant le deuxième album. À défaut de quoi, «il faudra qu'on me passe sur le corps», jure-t-elle, avant d'étouffer un léger ricanement.

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POP. Pascale Picard, All Things Pass, Simone Records.