S'il est une musicienne dont la démarche artistique est un mode de vie, c'est bien Loreena McKennitt. Elle fait le bilan de ses 30 ans de carrière en lançant The Journey So Far, un recueil de ses meilleures chansons. Trente ans de voyages à la recherche d'inspiration, mais aussi de travail administratif pour tenir elle-même les rênes de sa carrière. Car la poétesse à la harpe est également une femme d'affaires accomplie.

Comme tant de musiciens, Loreena McKennitt a joué du piano et fait partie de chorales enfantines dans sa ville natale du Manitoba, où elle a grandi entourée de musique.

«Quand j'ai découvert la musique celtique, j'ai vraiment été séduite par ses sonorités. J'avais l'intention de devenir vétérinaire et j'ai étudié trois mois à l'Université du Manitoba. Mais des occasions se présentaient pour chanter en public, et je voulais savoir jusqu'où je pouvais aller dans cette direction.»

Après quatre années passées à faire un peu de tout dans un théâtre de Stratford, en Ontario, elle a enregistré elle-même en 1985 son premier disque dans un studio situé dans une grange, à partir des conseils tirés d'un livre intitulé How to Make Your Own Recording.

Elle ne se doutait pas que cet album - qu'elle vendait elle-même en chantant dans les marchés publics de Toronto - constituerait la première brique d'un petit empire et de sa propre maison de disques et d'édition, Quinlan Road. Trente ans plus tard, l'artiste a vendu 14 millions d'albums tout en demeurant indépendante.

«Quand j'ai commencé à être assez connue, les grandes maisons de disques m'ont approchée, mais Warner était la seule capable de reconnaître ce que je pouvais apporter à notre partenariat. J'avais déjà les moyens de financer mes enregistrements, j'avais monté mon réseau de ventes et je produisais mes tournées. Tout était en place. Cela m'a permis de conclure avec eux une entente de nature très inhabituelle dans l'industrie de la musique. Pour chaque disque vendu, je perçois un pourcentage bien plus élevé que beaucoup d'artistes.»

On lui conseillait toujours d'avoir un agent. Après plusieurs rencontres avec des candidats potentiels, elle a réalisé que ce n'était pas pour elle!

Sur les traces des Celtes

Tout au long de son parcours, Loreena McKennitt a voyagé pour mieux comprendre la civilisation qui a servi d'inspiration à sa musique: celle des Celtes. Son prochain album, qui en est à un stade embryonnaire, ne fait pas exception puisqu'elle a visité le Rajasthan, en Inde, pour s'inspirer.

«J'ai considéré l'histoire des Celtes comme un tremplin créatif et j'ai décidé de voyager le plus possible, de visiter des sites archéologiques, des musées. Ce sont des voyages musicaux qui se transforment en art. C'est aussi le parcours d'une historienne amateure qui s'éduque en voyageant.»

Avec le recul, elle réalise que cette quête lui a aussi permis de mieux comprendre sa propre identité.

«Comme si en étudiant cette civilisation ancienne, j'essayais de trouver qui j'étais. Les Celtes étaient des gens créatifs, passionnés et déterminés. Ils étaient aussi mercenaires dans les guerres des autres. Et ils avaient un lien fort avec la nature. On a beaucoup en commun. En ce qui me concerne, je ne pars peut-être pas à la guerre, mais je suis toujours prête à défendre les causes en lesquelles je crois.»

Une femme inspirante selon Loreena McKennitt : Louise Arbour

La chanteuse admire cette grande Québécoise, ancienne juge à la Cour suprême du Canada, pour son travail humanitaire avec le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme et son travail actuel avec l'International Crisis Group.

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MUSIQUE DU MONDE. Loreena McKennitt. The Journey So Far: The Best of Loreena McKennitt. Quinlan Road Ltd.