Elle a déjà été très en colère. Mais aujourd'hui, la rappeuse amérindienne Eekwol affirme s'être beaucoup calmée. Ses chansons n'en sont pas moins percutantes, puisqu'elle dénonce toujours la dure réalité des autochtones au Canada. En spectacle mardi à la Sala Rossa, la chanteuse crie originaire de Saskatoon sera l'une des 30 artistes du 3e festival Mundial Montréal, qui se tient jusqu'à vendredi dans six salles montréalaises. Entrevue Premières Nations.

Q : Vous vous décrivez comme une «militante». De quoi parlent vos chansons? Féminisme? Premières Nations?

R : Des femmes, pas tant que ça. C'est un dossier que j'ai volontairement choisi d'éviter. Je ne voulais pas en faire un enjeu. Par contre, oui, je parle beaucoup de la réalité autochtone. Des problèmes, des revendications et de l'histoire de cette communauté. Difficile de ne pas être politisé quand on est issu des Premières Nations. Certains choisissent de se taire. Mais moi, j'ai décidé de parler.

Q : Colère?

R : Avant, oui, mais plus maintenant. J'ai compris que le négatif était contreproductif, alors j'ai essayé d'être plus diplomate. Plus constructive. Ce serait hypocrite de ma part de jouer l'antagonisme. Mon père est autochtone, mais ma mère est russe. Même si j'ai été élevée chez les Cris, je suis à moitié blanche. Cela n'a pas toujours été facile sur le plan de l'identité, mais ça me permet de mieux comprendre les deux côtés et d'équilibrer mon discours.

Q : Beaucoup de jeunes Amérindiens choisissent de s'exprimer par le hip-hop. La scène est très vibrante. Comment expliquez-vous cela?

R : Des raisons évidentes. D'abord, le rap a toujours été la tribune des exclus. Ensuite, c'est une forme musicale très rythmique, qui s'adapte bien aux percussions indigènes. Enfin, le rap permet de raconter des histoires. Nous avons une énorme tradition orale. Pour nous, cela allait de soi.

Q : Vous espérez changer les choses?

R : Amener une prise de conscience, ce serait déjà ça. Chez les Blancs, bien sûr, mais surtout chez les autochtones. Quand je raconte notre histoire du point de vue amérindien, je sens que ça fait réfléchir. Les jeunes commencent à se percevoir autrement. Dans ce sens-là, oui, je sens que mes chansons peuvent faire une différence...

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Eekwol est en spectacle mardi soir, à 22 h 20, à la Sala Rossa, avec Samian, Shaauit, Papagroove et Ibey.

Quoi voir au Mundial?

Chant de gorge inuit, musique latino, rap autochtone, percussions indiennes, folk celtique... Le 3e Mundial Montréal ratisse la planète de long en large, avec plus de 30 artistes issus de la scène world canadienne. Trois suggestions de La Presse.

A Tribe Called Red

Ils sont les leaders de la scène hip-hop/techno amérindienne. Leur mélange infectieux de beat électro et de rythmes autochtones est tellement efficace que leur dernier album (Nation II Nation) est passé très près de remporter le dernier prix Polaris. Un imparable mélange de tribal et de global, avec une grosse pincée de «Red Power».

Le 21 novembre à 1h à la SAT.

Mary Jane Lamond et Wendy MacIsaac

On l'a connue en 1995 sur Sleepy Maggie, succès du violoniste Ashley MacIsaac. Mary Jane Lamond poursuit depuis une discrète carrière de chanteuse et de folkloriste, spécialisée dans le patrimoine celtique du cap Breton. Elle sera sur scène avec la violoneuse Wendy MacIsaac (à ne pas confondre avec Ashley).

Le 21 novembre à 22h à L'Astral.

Vox Sambou

Quand il n'est pas occupé avec le collectif Nomadic Massive, Vox Sambou mène sa propre carrière de chanteur rap engagé. Son mélange de hip-hop et de rythmes antillais est aussi authentique que son discours social et ses réflexions sur l'identité. Créole, français, urbain, roots, soul, lucide, présent...

Le 21 novembre à 23h30 à la SAT.

Photo: fournie par l'artiste

Vox Sambou