Éric Lapointe, qui lancera le 26 novembre son nouvel album Jour de nuit, a accordé une entrevue exclusive à notre collaborateur Franco Nuovo. Pour vous mettre en appétit, voici un extrait de cette entrevue. L'entrevue intégrale, la vidéo réalisée dans l'appartement du chanteur, de même qu'un extrait du nouvel album sont diffusés en exclusivité sur La Presse+.

J'ai tranquillement attendu chez lui qu'il arrive. Il était en retard, ce qui est rare. Il est du genre plutôt ponctuel. Or, la journée avait été plus longue que prévu. Éric Lapointe qui lance un nouvel album, ça va, mais Lapointe, coach à l'émission La voix, c'est moins courant.

On était en milieu de semaine et il débarquait de la première répétition de ce concours de chant regardé par plus de 2 millions de téléspectateurs. Il est entré en forme, énergique, la tête pleine de son album Jour de nuit.

Commençons par Jour de nuit. Je rêve ou l'accouchement a été difficile?

Chaque album est difficile parce qu'il marque une étape dans ta vie. En ce qui me concerne, en tout cas. Évidemment, tu le sais, j'ai toujours vécu de nuit, toujours confondu le jour avec la nuit. Je suis un gars qui est aussi en constante lutte avec ses démons et en permanente dualité. Là, j'en suis à un point de ma vie où je me pose des questions.

Quelles questions?

Suis-je fait pour l'amour, sinon pour l'amour de la musique?

Hey! Tu l'avais préparée cette ligne-là?

Non, mais c'est la première entrevue que je donne, je crois que je vais m'en resservir...

(Il est de bonne humeur, Éric. Blagueur. Il a bonne mine. Il y avait longtemps que je ne l'avais vu comme ça. Faut dire que les dernières années n'ont pas été toujours faciles.)

Qu'est-ce que tu chantes dans Jour de nuit?

L'amour de la nuit, des chums, de la vie que je mène. Tu vois, dans la chanson Faire et refaire, je dis: «Je veux faire et refaire l'amour, mais sans ne plus jamais dire je t'aime.»

C'est parce que tu as été blessé?

Non, il n'y a pas de peine d'amour dans cet album, contrairement à d'autres. C'est davantage une réflexion. Au pire, je chante la désillusion face aux relations amoureuses.

T'es vraiment désillusionné?

Désillusionné et nostalgique en même temps. J'ai toujours vécu des amours houleuses et torturées. Je n'irais pas jusqu'à dire malsaines, mais... J'ai 44 ans et je commence à réaliser des choses. Les enfants, j'ai fermé le dossier. Je suis heureux de les avoir eus. Je sais que je ne serai plus jamais seul, donc pas besoin de combler ma peur de la solitude avec une femme.

Quoi?

J'ai dit UNE femme. Je ne chante pas la peine d'amour, mais je chante encore mon amour pour la femme.

(Ce mec est un livre ouvert. Il ne cache rien, en est incapable. La maison est calme, sans mouvement, sans cri, sans brouhaha. Les enfants sont chez leur mère.)

Je te connais assez pour savoir que tu ne peux pas vivre sans amour.

Personne n'est capable, mais je me demande si j'ai besoin d'avoir une blonde à temps plein. Ça fait partie de ma réflexion. Je me surprends à rentrer chez moi tout seul le soir et être bien. Je me surprends à dormir seul et en paix.

Jour de nuit est-il très différent de Ma peau ou Coupable?

Il est rock, plus cru, plus dénudé. Il y a moins d'artifices, moins de solos de guitare, même s'il y en a quand même. On ne s'en sort pas. Quelqu'un qui l'a entendu m'a dit: «J'ai l'impression de te retrouver dans Obsession». Il y a peut-être une petite odeur. Comme je le dis dans une chanson: «Tout ce que je veux, c'est chanter comme un délinquant, j'ai tout ce que je veux, pis il n'y a rien de mieux qu'être un enfant oublié par le temps.» En fait, je réalise que je suis bien, que je gagne bien ma vie, que j'ai de beaux enfants, que je suis privilégié. Tu sais, j'ai toujours eu l'impression que j'allais crever jeune. Et je faisais tout pour. Je suis maintenant trop vieux...