Un an après Lisa LeBlanc, un vent frais maritime souffle de nouveau avec la musique des soeurs Boulay. À la sortie de leur premier album, Le poids des confettis, les deux jeunes femmes nées à New Richmond suscitent un enthousiasme à la hauteur de leur charisme sur scène.

Ces deux filles chéries d'un fier père gaspésien ont grandi en cherchant tous les prétextes pour chanter devant un public. À l'adolescence, elles ont pris des chemins différents pour forger leur identité. Puis, par un beau lendemain de brosse, Mélanie et Stéphanie Boulay ont enregistré une chanson dans leur appartement. Elles l'ont mise en ligne sur Facebook, sans savoir que cette bouteille lancée à la mer allait les mener loin.

Des voix, une guitare ou un ukulélé: c'est tout ce dont ont besoin les soeurs Boulay pour que la magie opère.

Au printemps dernier, les jeunes femmes de 23 et 26 ans ont remporté le prestigieux concours des Francouvertes. En spectacle, elles ont un petit coffre aux trésors entre les mains. Stéphanie et Mélanie marient épuration et émotion avec un charme unique. Leurs voix sensibles en harmonie. C'est tout simple. Tout beau.

Des paroles comme «Ôte-moi mon linge» et «Tu ne me présenteras jamais ta mère» portent la signature de deux grands coeurs romantiques aux émotions à fleur de peau. «Tellement! lance Mélanie. On vient d'une famille de braillards et de bons vivants.»

Si leur soeurs Boulay se complètent et chantent en symbiose, leurs tempéraments sont foncièrement différents. Plus organisée et «concrète», Stéphanie est la chef d'orchestre qui sait mener sa jeune soeur à bon port dans ses élans créatifs. Pour Mélanie, être organisée représente un apprentissage constant. «Je me suis améliorée, dit-elle. Au début, c'était difficile, car je suis le genre de personne qui n'aime pas prévoir ce qui arrive le lendemain.»

Au cégep, ce contraste de caractère a poussé les soeurs Boulay sur des chemins différents. «Je suis parti étudier en musique à Drummondville. Il fallait forger nos identités chacune de notre côté», confie Stéphanie.

Cette distance a porté ses fruits: aujourd'hui, Stéphanie et Mélanie ignorent comment elles ne pourraient pas partager la même route. «Je ne pourrais pas chanter seule», disent l'une et l'autre.

Depuis qu'elles ont remporté les Francouvertes, les soeurs Boulay ont présenté quelque 50 spectacles partout au Québec. Un choix avant la sortie du premier album? «On ne s'est pas posé de questions. Quand une offre venait, on l'acceptait. En même temps, on composait», raconte Stéphanie.

«On aime tellement faire des spectacles et de la route, poursuit Mélanie. Quand on nous offre de faire la première partie d'Avec pas d'casque, on ne peut pas refuser! En même temps, ma philosophie c'est de rencontrer et de bâtir notre public en allant chercher les gens un par un en spectacle.»

Imperfection authentique

Pour ceux qui étaient séduits par les soeurs Boulay sur scène, il était intéressant de voir comment un projet aussi fort allait se transposer en album. «On a fait le EP [réalisé par Éric Goulet] avec de petites ambitions pour faire un démo promotionnel, mais on en a vendu plus de 3000, explique Stéphanie. En spectacle, on s'est rendu compte que les gens l'avaient écouté. On voulait faire l'album comme le EP, mais on a senti le besoin de se renouveler et de réinventer. On a évolué et les chansons ont beaucoup vécu sur la scène.»

Quand leur imprésario Eli Bissonnette (Coeur de pirate) leur a demandé avec quel réalisateur elles voulaient travailler pour l'album, le nom de Philippe B fut lancé en boutade. Pour le patron de l'étiquette Grosse Boîte, ce n'était qu'un coup de fil à passer. «C'est une idée qu'on peut avoir dans la tête, mais qu'on ne peut pas oser demander», dit Stéphanie.

Philippe B a répondu aux volontés musicales des filles. Rajouter des «petites étincelles» d'arrangements, tout en subtilité. «On a un style country-folk, mais on ne voulait pas aller dans le style Nashville avec des pedal steel et des violons, explique Mélanie. Philippe est arrivé avec des arrangements d'instruments auxquels on n'aurait jamais pensé: égoïne, de l'omnicorde, de l'harmonium...»

Les deux soeurs sont satisfaites du résultat. Un album «pas froid», «imparfait», «sensible» et «clair obscur», énumèrent-elles. «Il y a de l'espace dans le son. On a mis des micros partout dans la pièce», explique Mélanie.

L'inspiration folk de Stéphanie se remarque dans les textes intimes des chansons Sacs d'école et Mappemonde. Les sources rock de Mélanie sont derrière l'écriture plus thématique de Ça mouille les yeux et Un trou noir au bout d'un appât.

Candeur

Stéphanie et Mélanie se querellent à l'occasion, mais leur relation filiale n'est pas une source d'inquiétude autant que la forte demande suscitée par le succès qui a affecté leur candeur (parlez-en à Lisa LeBlanc).

«C'est déjà commencé, se désole Mélanie. Mon Dieu, c'est tellement difficile... apprendre à devenir des filles de caractère. Dire non. Décevoir des gens. Mais il faut le faire, car sinon, c'est nous-mêmes qu'on brime.»

En même temps, tout cela est très nourrissant pour l'écriture et la création. «Le fait de s'assumer nous amène à parler de nos côtés plus sombres», dit Stéphanie.

Mais ne sautons pas d'étape: Stéphanie et Mélanie ont encore les deux pieds dans le bonheur et la lumière. Et une autre tournée s'en vient avec... deux frères (!), Gabriel et Renaud Gratton.

Les Soeurs Boulay se produiront également au Club Soda,  le 21 juin, dans le cadre des FrancoFolies.



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CHANSON

Les Soeurs Boulay. Le poids des confettis. Grosse Boîte. En magasin mardi.