Jack White a accordé une entrevue à La Presse cinq heures avant le spectacle qu'il a donné à guichets fermés, hier soir à l'Olympia. Voilà un artiste qui a du blues dans le sang et qui déteste les compromis, au point où il aurait voulu être musicien dans les années 1920.

C'est au déjeuner que Jack White a décidé que son groupe de gars allait l'accompagner sur scène, hier soir. «Différents trucs influencent ma décision, mais là, ça fait simplement plus longtemps que j'ai joué avec les gars.»

En tournée, Jack White est en effet accompagné d'un groupe de filles (Peacocks) et d'un groupe de gars (Buzzards) - ce qui explique les quatre autocars qui transportent tout ce beau monde d'une ville à l'autre.

Chaque spectacle est unique, avec un programme différent. «J'essaie de ne pas prendre le chemin facile, indique White. Pour que ce soit intéressant et que cela provoque des idées qui me forcent à être créatif sur scène, c'est inspirant d'avoir deux groupes différents.»

Samedi soir dernier, Jack White a déclenché la colère de la foule du Radio City Hall, à New York, en interrompant le spectacle après 50 minutes. Le son était mauvais, paraît-il. Mais le lendemain, il a joué aussi longtemps que prévu.

White est perçu comme une sorte de «génie», un artiste au tempérament «spécial» et un homme divorcé deux fois, qui aurait une relation complexe avec les femmes (selon un article controversé paru dans The Atlantic le printemps dernier). Mais dans la salle de conférence de l'Olympia, hier après-midi, sa générosité et sa simplicité étaient déconcertantes. Rares sont les artistes de son calibre qui accordent ainsi une entrevue quelques heures avant un spectacle qui affiche complet.

Le musicien blues-rock n'aime pas les choses programmées et établies. Il a sorti du matériel au sein de The White Stripes, Dead Weather et The Raconteurs avant de lancer Blunderbuss, le printemps dernier.

«Sortir un album solo, c'était abandonner des batailles intérieures que j'avais avec l'aspect formaté de l'industrie. Tu n'es pas supposé démarrer un groupe, en avoir plusieurs en même temps... J'ai pris de mauvaises décisions d'affaires, explique-t-il. L'album solo, c'est arrivé naturellement quand j'ai enregistré des chansons sans trop savoir quoi faire avec elles. C'est ce que j'aime. Ce n'était pas un scénario prévu avec mon imprésario.»

En d'autres mots, Jack White n'a pas de plan et il déteste en avoir. «Quand je veux mettre des choses en place, je veux que ce soit rapide.»

Propriétaire du studio et du label Third Man Records à Nashville, White a collaboré avec Tom Jones et Beck, comme il a donné un second souffle aux carrières de Wanda Jackson et de Loretta Lynn.

«Avant d'avoir mon studio, j'avais la mentalité de tout boucler rapidement pour économiser de l'argent. Maintenant, je peux prendre tout le temps que je veux. Le défi, c'est de résister à la tentation de trop en faire et de savoir quand arrêter.»

Jack White aime-t-il la période musicale dans laquelle il évolue? «Je n'aurais jamais choisi cette époque, lance-t-il. Je serais probablement né en 1920. Les premiers albums blues sortaient, la société évoluait rapidement... sans être parfaite, la culture était intéressante, surtout en musique, que ce soit pour les Blancs ou les Noirs. Aujourd'hui, à l'ère de Twitter, ce n'est pas aussi romantique. C'est mon défi, faire ressortir la romance dans mon travail. Third Man Records m'a beaucoup aidé à recréer de tels moments.»

White a du blues qui coule dans les veines, ce qui inspire à la fois son coup de guitare et ses démarches musicale et artistique. «Le blues, c'est la racine du rock et de la musique moderne. Pour moi, c'est la vérité. C'est l'expression dans sa force la plus haute et la plus belle. C'est simple et c'est mystérieux.»

Et c'est à l'image de Jack White.