Puristes du jazz, regardez ailleurs: ce soir, au Métropolis, on ne saurait être plus loin de la note bleue qu'avec ce programme double mettant en vedette Zach Condon (Beirut), jeune prodige de la scène indie pop, et le duo californien pop-psychédélique-minimaliste The Dodos, futures nouvelles stars de cette même scène.

Les billets pour cette soirée au Métropolis se sont envolés comme de petits pains chauds. À l'évidence, les mélomanes montréalais se sont entichés de la musique de Beirut, le projet d'un jeune auteur, compositeur et interprète de 23 ans originaire du Nouveau-Mexique qui enrobe ses compositions inspirées d'arrangements typiques de la musique des Balkans. Entre guitare folk et cuivres gitans, Beirut s'est construit une niche bien personnelle dans le paysage indie pop à l'aide de deux albums bien reçus par les fans et la critique, Gulag Orkestar (2006) et, surtout, The Flying Club Cup (2007).

 

Et les Dodos, eux? Leur renommée n'a pas encore atteint celle de celui pour qui ils réchaufferont la salle, mais ils y travaillent, et leurs premières chansons ont déjà fait beaucoup de bruit sur la planète indie. Aussi, question réchauffement de foule, vous pouvez compter sur le chanteur et guitariste Meric Long, le batteur (aussi chanteur) Logan Kroeber et, depuis peu, le vibraphoniste/multiinstrumentiste Keaton Snyder, pour faire le travail.

«On a trouvé un autre Dodo, oui!» lance Meric, attrapé chez lui, à San Francisco, alors qu'il faisait la queue à la banque. «Un très bon musicien, de formation classique. On a hâte de voir ce que ça donnera en spectacle, puisque c'est sa première expérience dans un groupe, mais il a des talents que peu de gens ont. Franchement, on commence à peine à jouer ensemble ailleurs qu'en studio, alors on va voir ce que ça va donner!»

De la grande visite

Sauf erreur, les Dodos n'ont donné qu'un seul concert à Montréal, à la suite de la sortie du premier album, Visiter, en mai 2008 (label Frenchkiss). C'était durant Pop Montréal, en octobre dernier, dans une Sala Rossa pleine à craquer. Le buzz avait fait son oeuvre, personne n'a été déçu: beaucoup plus rock et dégourdis que sur disque, les Dodos ont offert une jubilatoire performance de folk-rock-psychédélique, bruyante même s'ils n'étaient que deux à jouer, d'une intensité qui ne parvenait pas à gommer le sens de la mélodie qui habite les chansons du duo.

«Et pourtant, c'était loin d'être notre meilleur concert, avoue candidement Meric. En fait, si je me souviens du spectacle, je me souviens à peine de Montréal: j'avais attrapé la mononucléose pendant cette tournée. C'était bizarre: je passais mon temps à dormir, on me réveillait pour me dire dans quelle ville je me trouvais et pour me traîner sur scène...»

Plus positif, plus rock

Meric, complètement remis, et ses collègues promettent de nous en mettre plein les oreilles, notamment avec une fournée de chansons toutes fraîches qui paraîtront sur leur nouvel album, Time to Die, le 31 août prochain. «Malgré ce que le titre peut laisser croire, c'est un album assez positif, prévient Long. Lorsqu'on a commencé à écrire ce disque en janvier, on venait de terminer notre tournée. C'était à la fois le sentiment de commencer quelque chose de nouveau, mais aussi prendre la mesure de tout ce qui s'est passé dans nos vies depuis la sortie de Visiter. Tu sais, on rêvait de vivre de notre musique, mais on ne croyait pas que ça allait arriver, encore moins aussi vite.»

Plus positif, ce nouvel album, mais de facture plus rock aussi. Réalisé par Phil Ek, qui a fait des merveilles sur les albums récents de Fleet Foxes, Band of Horses et The Shins, Time to Die préfère la guitare électrique à l'acoustique, tout en mettant de l'avant le jeu de batterie particulièrement riche de Kroeber.

La pointe de l'iceberg?

The Dodos semblent être la pointe d'un iceberg de renouveau indie rock en provenance de la Californie. Une autre des nouvelles formations les plus intéressantes du coin, No Age, est aussi un duo guitare, voix/batterie (sur Sub Pop). Hasard ou pas? «Hasard, tranche Long. Ou nécessité: j'étais à l'école lorsque j'ai monté mes premiers groupes et, honnêtement, il n'y a pas moyen de faire de l'argent lorsqu'on est un groupe de rock. Travailler à deux permettait de mieux nous faire payer pour les spectacles qu'on faisait.»

«Cela étant dit, pour nous, le son de The Dodos a, à sa base, celui du fingerpicking de la guitare - je sais que ce n'est pas si évident que ça lorsqu'on écoute ma musique, mais je t'explique. L'idée du groupe vient de là: une guitare acoustique, fingerpicking, le son que ça crée, tenter d'amplifier ça au maximum. Et pour moi, le meilleur moyen de mettre l'accent sur ce style de jeu de guitare, c'était en ajoutant une batterie. C'est ça, The Dodos, même si on évolue plus en plus vers un son rock. Mais à l'origine, c'est ça: comment faire sonner le plus fort possible une guitare acoustique.»

Meric est modeste, puisqu'il omet de souligner l'importance des chansons, du jeu tout simple et beau des harmonies vocales, de la force des mélodies qui donnent tout son sens à la démarche sonore du duo devenu trio.

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EN UN MOT

The Dodos, nouvelle saveur indie rock qui entend durer.

PROCHAIN DISQUE

Time to Die, Frenchkiss, 31 août 2009.