Un an et demi après l'enterrement de Polémil Bazar, l'ex-chanteur du groupe, Hugo Fleury, présente son premier album solo. Soudure mexicaine est arrivé hier chez les disquaires. Ton plus incisif et son plus rock qu'au temps d'avant, Hugo Fleury reste toutefois fidèle à son sens de la fête, en gardant des couleurs chaudes et un soupçon d'accordéon sur ses musiques.

Q Une des raisons qui ont mené à l'enterrement de Polémil Bazar, c'était son parti pris pour la chanson engagée; on ne vous embauchait pas pour des spectacles d'entreprise à cause de vos idées. En solo, tu poursuis dans la chanson engagée. Est-ce du courage?

 

RCe n'est pas si politisé que ça, c'est socialement engagé. Je suis plus détaché des partis en vieillissant et plus près des idées. En fait, il n'y a pas un parti auquel je puisse m'identifier... Quand tu fais de la chanson engagée, c'est pas quelque chose qui passe beaucoup sur les radios communautaires. Pour les ventes de billets, c'est plus dur. Les gens courent plus le divertissement rigolo. Ils veulent se divertir, parfois s'engourdir. Il y a un public pour un art plus engagé, mais ce public est plus restreint. La majorité des gens attendent quelque chose de joli qui les berce, qui leur fait oublier que leur vie est difficile. Je ne veux pas leur faire la morale, la vie est difficile.

Q Mais tu persistes dans la chanson engagée malgré ton constat. Pourquoi?

R J'ai pas le choix de persister. J'ai appris la guitare pour sortir la rage que j'avais en dedans. Le point de départ reste le même et ne va pas changer, ce ne serait plus moi. L'art, il faut que ça vienne de soi. Quand je fais quelque chose de plus léger, il y a beaucoup d'ironie et je trouve quand même le moyen de mordre.

Q Le son rock, c'était un désir qui germait depuis longtemps?

R Pendant la dernière année de Polémil, ça devenait assez rock sur scène, même si c'était pas électrique, et j'ai repris goût à ça, courir sur la scène. J'ai perdu beaucoup d'instruments en arrêtant le groupe, je me suis retrouvé seul et j'ai joué ce que je pouvais jouer. La guitare électrique m'inspirait et, au final, j'ai embauché assez peu de gens pour l'album.

Q Vous n'avez jamais expliqué pourquoi Polémil Bazar se séparait. On aimerait bien savoir...

R On s'est un petit peu plantés avec notre troisième album. On a vendu la moitié moins que le deuxième, alors qu'on avait pourtant la grosse machine de Tacca avec nous. Nos attentes étaient un peu trop élevées; or il vaut mieux ne pas trop avoir d'attentes, surtout dans le contexte actuel. Les gens qui nous suivaient depuis le début nous ont dit qu'on ne les avait pas assez surpris, et le public plus large, qu'on aurait aimé atteindre, il n'est pas venu. Aussi, on avait l'impression d'avoir fait le tour du concept, la fatigue s'est imposée. Je ne voyais pas la possibilité de faire un quatrième album, mais on est restés amis.

Q Qu'est-ce qui te rend fier au sujet de Soudure mexicaine?

R J'avais un urgent besoin de le faire face à moi-même. Je l'ai produit, je suis allé chercher le financement et je suis fier de ce que j'ai réussi à faire sur le plan musical. Ma préférée, c'est L'étau, car je crois que j'ai touché quelque chose de très authentique. J'ai trouvé un son particulier qui me ressemble, c'est post-Polémil! Il y a une couleur Hugo Fleury, très électrique, et j'ai fait les percussions dans ma remise en frappant dans des canisses et des bouteilles cassées! Aussi, le texte part du je-me-moi, mais s'ouvre vers le monde et il est très critique.