Marcos Valle sortait à peine de l'adolescence quand Rio a basculé dans la bossa nova. L'impact fut si considérable pour le jeune qu'il abandonna ses études de droit pour vivre la bossa, une forme qu'il n'a cessé de faire évoluer depuis. Celui à qui l'on doit le classique Samba De Verao se produit ce soir au Gesù, dans le cadre d'un concert pour commémorer le cinquantenaire de la bossa nova.

«Je fais partie de la deuxième vague de la bossa, estime le musicien Marcos Valle. Le premier vrai disque de bossa nova, en fait, fut Chega de Saudade/Bim Bom, de João Gilberto, en 1958. J'étais déjà un fan fini de musique, j'étudiais la musique classique depuis l'enfance, mon esprit était entièrement tourné vers la musique. J'assistais alors à tous les concerts que cette scène bossa pouvait offrir.»

 

En 1961, il croise dans un autobus municipal Edu Lobo, qu'il avait connu à l'école secondaire.

«Il avait une guitare avec lui, ce qui m'avait mené à lui confirmer mon grand intérêt pour la musique. Il m'avait alors confié que son père, un compositeur réputé de Rio (Fernando Lobo), l'avait présenté aux créateurs de la bossa nova. Avec Dori Caymmi, Edu Lobo et moi avons alors formé un trio. Rapidement, nous avons fait un peu de télévision, puis nous avons pu faire la rencontre de Vinicius de Moraes. Le milieu de la bossa nova a commencé à apprécier ma musique, j'ai pu l'enregistrer.»

Une pérennité imprévue

À l'époque, Marcos Valle n'avait absolument pas idée que ce mouvement musical, né sur les plages de Copacabana, deviendrait planétaire.

«Nous cherchions une qualité qui puisse rester, mais nous n'avions pas l'intention particulière de devenir des stars internationales. À vrai dire, il ne me serait jamais venu à l'esprit que l'on en parlerait encore 50 ans plus tard.»

À quoi attribue-t-il cette pérennité?

«Je crois que la combinaison d'harmonies raffinées et de rythmes nouveaux a vraiment frappé l'imaginaire mondial. Ces riches harmonies ont d'abord intéressé les jazzmen car elles étaient propices à l'improvisation.»

Puis, comme tous les mouvements artistiques, la bossa nova a baissé en popularité après avoir créé un impact majeur en Occident. Au Brésil, elle était devenue un cliché touristique, confinée au répertoire des musiques d'ascenseur. À la fin des années 80, le vent a tourné de nouveau en faveur de la bossa. Un vent de l'étranger, il faut dire: plusieurs musiciens du monde entier (acid jazz, groove électro, etc.) ont repris cette forme en en conservant l'esprit brésilien. De nouveaux auditoires s'étaient formés partout dans le monde.

Une renaissance

«Lorsque, en Europe, la bossa est revenue en force, plusieurs Brésiliens en ont eu l'écho. Lorsque ces jeunes musiciens étrangers (anglais, allemands, français, etc.) étaient interviewés par les médias brésiliens, ils citaient Jobim, Gilberto, de Moraes, mais aussi Joyce, moi-même et plusieurs autres. Nos carrières s'en sont mieux portées ensuite.

«Ainsi, les étrangers ont intéressé les jeunes Brésiliens à la bossa nova. Pour son 50e anniversaire, elle est carrément revenue à la mode. C'est incroyable! C'est une vraie renaissance, nous avons beaucoup de travail au Brésil. Qui plus est, je ne cesse de tourner à l'étranger.»

Ce soir, 20h, au Gesù, Marcos Valle partage le programme avec Roberto Menescal. Il sera accompagné par une formation montréalaise, avec notamment le saxophoniste Jean-Pierre Zanella.