Oubliez les graphiques et les diagrammes. Après deux décennies à rouler sa bosse dans l'industrie de la musique, Raine Maida a finalement découvert qu'il existe une méthode infaillible pour lui permettre de mesurer le succès d'une oeuvre.

«C'est le test d'écoute», résume l'artiste de 43 ans, bien installé dans un café de Toronto.

«Quand tu t'assois, que tu fais jouer ta musique pour quelqu'un que tu respectes et que tu ressens quelque chose dans le ventre, et que tu te dis: «Oh mon Dieu»... tu sais que c'est mauvais parce que tu commences à te sentir malade.»

Après avoir trôné au sommet des palmarès au Canada avec le groupe rock Our Lady Peace - vendant des millions d'albums à travers le monde et remportant de nombreux prix aux Juno -, Raine Maida voit maintenant son travail différemment.

Et le fait de travailler à plus petite échelle lui permet de s'épargner les nausées provoquées par le stress inhérent à ce succès commercial.

Mardi, il sortira son premier album solo en six ans, We All Get Lighter. L'opus propose des pièces aériennes, majoritairement acoustiques, qui s'articulent autour de l'importance de vivre dans le moment présent.

Raine Maida n'a cependant pu s'empêcher d'y inclure du matériel socialement engagé - par exemple, la chanson S.O.S. s'amorce avec un enregistrement du militant Howard Zinn, qui fait la promotion de la désobéissance civile. Et dans le premier extrait de l'album, Montreal, l'artiste remet en question le fait qu'il revendique un niveau de vie aussi privilégié.

«Ma lecture préférée, c'est (le magazine) Adbusters, et à partir du moment où on s'y intéresse, les synapses commencent à fonctionner différemment», résume-t-il.

«C'est ce qui alimente mon côté créatif, en quelque sorte.»

Autrement, la vie personnelle de Raine Maida est l'incarnation même de la stabilité. Il est marié depuis 13 ans à l'auteure-compositrice-interprète de Winnipeg Chantal Kreviazuk, avec qui il a trois enfants.

Une vie comportant plus de bouleversements rendrait-elle son travail de parolier plus facile?

«J'écris rarement quand je me sens bien, répond-il. Peut-être que le fait de m'intéresser à ces enjeux (politiques) me donne de la matière pour écrire. Évidemment, ces choses me passionnent, mais c'est définitivement le carburant qui me permet d'écrire.»

Mais sinon, We All Get Lighter passe-t-il le fameux test d'écoute?

«Il y a des moments sur l'album où je peux vraiment me laisser aller et l'apprécier peu importe qui est dans la pièce - même des gens beaucoup plus cool que moi», lance-t-il en riant.

Chose certaine, il dit être nettement plus à l'aise qu'il ne l'était auparavant.

«J'imagine que c'est la confiance ou la maturité (...) Mais c'est un sentiment agréable de ne pas avoir envie de vomir quand une personne écoute ton album!»