La liste des chanteurs que la Société musicale André-Turp présentera la saison prochaine comprend un nom inconnu: Florian Boesch. Le jeune baryton autrichien, qu'on entendra le 10 février à Redpath Hall, vient de signer un disque Schumann chez Onyx: 25 lieder, une heure de musique entièrement sur des poèmes de Heinrich Heine. Le poète mourut la même année que Schumann, 1856, mais les deux ont davantage en commun: un mélange de mélancolie et d'ironie, bien illustré par ces pages et par leur interprète.

Le nouveau venu a inscrit du Schumann à son programme de Redpath; on n'en connaît pas encore le détail mais on suppose - on espère surtout - qu'il puisera au contenu de ce disque tout à fait exceptionnel.

Florian Boesch, élève de Robert Holl, propose ce qui est peut-être la plus frappante et la plus personnelle de toutes les nouvelles voix d'homme spécialisées dans le lied que le disque nous a révélées ces récentes années: un baryton au timbre proche de la voix de basse (comme Holl d'ailleurs), sombre, viril et sonore, capable aussi des plus douces subtilités.

Bien sûr, il n'y a pas que la voix. L'impression très forte que laisse le disque vient de la façon miraculeuse avec laquelle le chanteur utilise cette voix, la réduisant parfois jusqu'au murmure. À chaque instant, il semble raconter une histoire. Sa pénétration du texte et de chaque mot est à ce point totale.

Florian Boesch chante ici un seul cycle: le Liederkreis op. 24, qui groupe neuf lieder ayant comme sujet une peine d'amour dont la nature est le témoin muet. À l'exception de la longue ballade dramatique Belsazar, op. 57, les autres lieder sont tous tirés de divers recueils. Ainsi, des 26 pièces du cycle Myrten op. 25, Boesch n'a retenu que les trois dont les textes sont de Heine, ce qui nous vaut donc le sublime Du bist wie eine Blume («Tu es comme une fleur»). De même, on retrouve ici la «chanson militaire» Die beiden Grenadiere et le pathétique lied à trois volets Der arme Peter, entre autres titres familiers.

Le pianiste Malcolm Martineau est un accompagnateur aussi présent et expressif que le chanteur et la prise de son est parfaitement naturelle. Bref, un disque à placer déjà parmi les grandes réalisations de l'année.

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FLORIAN BOESCH, BARYTON: SCHUMANN, ONYX, 4041