Au moment du rappel, hier soir à la Maison symphonique, Pierre Lapointe a remercié le public de s'être prêté au jeu de son spectacle Amours, délices et orgues, un objet étrange qui ressemble aux créations collectives des années 70, sans le patchouli et l'odeur de swing, a-t-il dit avec juste ce qu'il faut d'autodérision.

Oui, il faut aimer Pierre Lapointe d'amour pour apprécier d'un bout à l'autre ce spectacle qui va dans toutes les directions et se perd parfois en chemin. À ma collègue Stéphanie Vallet, Lapointe parlait d'un joyeux fouillis réglé au quart de tour; à une journaliste du Soleil, d'un show d'Yvon Deschamps 2.0 version intello. Mais n'est pas Yvon Deschamps qui veut et, même si Lapointe a prouvé depuis le début de sa carrière qu'il a la langue bien pendue, certains des monologues qu'il nous a servis hier, avec la complicité de l'auteur Étienne Lepage, constituaient par leur facilité le maillon faible de ce show éclaté.

Lapointe, on le sait, a réuni autour de lui une équipe multidisciplinaire, fidèle en cela à l'artiste curieux qu'il a toujours été et à qui on ne pourra jamais reprocher de se contenter de surfer sur sa popularité. Contribuent donc notamment à cet Amours, délices et orgues un danseur, une designer industrielle, un concepteur d'éclairages, le comédien Éric Bernier, la metteuse en scène Sophie Cadieux - qui se joindra au groupe sur scène au rappel - et des musiciens, dont l'organiste attitré de la Maison symphonique, Jean-Willy Kunz. Le grand orgue Pierre-Béique est omniprésent et ça nous vaut quelques-uns des moments les plus forts de la soirée: la nouvelle chanson La science du coeur, envoûtante, servie au début et à la fin du spectacle, la puissante finale de Tel un seul homme, qui donne lieu à l'un des plus beaux tableaux de la soirée, et La solitude, empruntée à Ferré dans une version peu rassurante, la voix robotique de Lapointe s'appuyant sur le grand orgue.

Prendre la parole

D'entrée, Lapointe fait son coming out: il adore le hockey. Plus tard, au moment de présenter une adaptation en français très réussie de Glad to Be Gay de Tom Robinson, il se fera plus sérieux le temps de réitérer l'importance de prendre la parole quand le massacre d'Orlando, le mouvement anti-mariage gai en France et la chasse aux homosexuels en Tchétchénie viennent ébranler notre conviction que nous vivons aujourd'hui dans un monde plus évolué que le Royaume-Uni que dénonçait le chanteur militant Robinson il y a 40 ans.

Parmi les autres numéros mémorables, il y a ce texte que lit Lapointe avec pour seul accompagnement une boîte à musique, et au moins une chanson inédite, intitulée La plus belle des maisons. Mais ce spectacle aurait avantage à être resserré, notamment le duo avec Éric Bernier qui n'en finit plus de finir.

Pierre Lapointe et sa bande remettent ça ce soir, demain et samedi à la Maison symphonique.

Photo Olivier Pontbriand, La presse

Pierre Lapointe remontera sur la scène de la Maison symphonique ce soir, demain et samedi.